samedi 21 septembre 2019

Vie ma vie de geoise-bour


Et sinon l'autre jour j'étais au spa.

Mes copines Sarah et Coralie s'étaient dit que ce serait cool de se faire une après-midi entre filles, sans nos bébés respectifs, et qu'on pourrait laisser les papas faire du baby-sitting ensemble, et elles m'avaient invité à la fête.

J'y suis allée non sans remords, parce que je me sentais quand même vachement moins légitime qu'elles dans leur quête de relaxation.

Faut dire que mes copines étaient en congé maternité, à la maison seules toute la journée avec leur bébé, et avec leur mari qui bossait et qui rentrait seulement le soir, donc ça semblait logique qu'ils prennent le relais une fois de temps en temps. Tandis que pour Flaxou et moi, c'est le branle-bas de combat tous les jours que dieu fait ! On est constamment sur le front tous les deux, et donc ça semblait plutôt injuste que je le laisse galérer avec les deux bébés pendant que moi j'allais me prélasser au sauna à raffermir mes pores.

Mais au final, j'ai réussi à alléger ma conscience en offrant une aprèm de détente similaire à Flaxou :

- On n'a qu'à faire comme ça : la semaine prochaine, je m'occupe des enfants, et toi, tu peux, par exemple, aller te faire faire un massage!
- Mouais.
- Une soirée jeux avec tes potes?
- Bof.
- Une après-midi seul dans le noir en slip devant ton PC avec une bière à jouer à des jeux de gestion chiants?
- HAN MAIS OUAIIIS!


(La vie selon Flaxou.)

Et donc on s'est embarquées toutes les quatre, Sarah, Coralie, Gaëlle et moi, pour passer enfin quelques heures sans bébés dans les pattes.

- Bienvenue au spa, laissez-moi vous préparer un peignoir, ainsi que...
- VOUS FAITES DES APEROLS SPRITZ?

Ah, oui, et pour pouvoir enfin boire de l'alcool, aussi.

(J'ai bu mon premier kir framboise depuis octobre dernier.)

(J'étais pompette au bout de deux gorgées, mais ça valait le coup.)

On est entrées dans le spa, et on s'est immédiatement senties super ploucs, parce que c'était un endroit super fancy, à base de déco en bois flotté et de grosses jarres en terre cuite, et moi j'étais là avec mon sac de piscine fabriqué avec une taie d'oreiller, bonjour la te-hon.

C'était un endroit tellement classe qu'ils avaient le signe qui ne trompe pas : les bombonnes d'eau avec du citron et de la menthe dedans.

Et, je t'avoue, quand on s'est toutes posées sur des transats dehors, autour de la cascade qui plongeait dans la piscine d'eau thermale, avec nos cocktails à la main, on s'est dit qu'on vivait vraiment notre meilleure vie.

- Vous trouvez pas qu'on est carrément dans Sex and The City?
- Mais grave!
- Mais pour être dans Sex and the City, il faudrait pas qu'on couche avec plein de gars?
- Ben on est mal barrées alors, on a couché avec deux mecs dans toute notre vie.
- Non, c'est pas vrai!
- ....
- Moi, j'en ai eu genre QUATRE!

Alors on a déploré notre vieillesse et le fait qu'on aurait carrément pu être des meufs promiscuiteuses dans notre folle jeunesse, mais qu'on avait loupé le coche – notamment Sarah et Coralie qui passaient leurs soirées étudiantes à la Salamandre mais n'ont en fait jamais pé-cho:

- Mais t'avais pas couché avec le mec, là, qui avait les Converse?
- Ah mais non!
- Ah, je pensais.
- Et toi, tu t'étais pas tapé le gars avec les longs cheveux, celui qui jouait de la guitare?
- Mais pas du tout!
- Ah, je croyais.

(3615 les nanas qui sont amies depuis dix ans et se rendent compte maintenant qu'elles étaient en fin de compte pas des filles faciles.)

(Moi j'étais exclue de cette conversation, puisque je passais mes soirées étudiantes chez ma mère, avec mon chat et mes VHS de Friends.)

(Oui, mes VHS.)

(Je suis vieille à ce point.)

Et donc on a essayé toutes les attractions que proposaient le spa, comme le sauna :

- Haaan mais c'est trop chaud!

Le hammam :

- Aaaaah mais je vais mourir!

Et puis ensuite on a vu qu'il y avait un autre sauna encore plus chaud, mais Sarah a menacé de décéder sur place si on y allait, alors on s'est rabattu sur des activités moins calorifères.

(N'empêche que mes pores sont hyper propres.)

Alors on a testé des endroits exotiques, comme la douche sensorielle : un parcours avec différentes douches qui s'allumaient au fur et à mesure, et qui te promettaient de te faire vivre un tour du monde de la pluie (avec bruitages en prime) : les grosses gouttes tièdes de la mousson indienne, la douce bruine d'un soir d'été en Californie, le torrent d'une cascade polynésienne....

- Heu, les meufs? Je veux pas faire ma connasse, mais là on dirait quand même vachement les Ardennes en novembre.

Un peu refroidies (LITTÉRALEMENT), on s'est rabattues sur des trucs encore plus mystérieux, comme une pièce qui proposait de la "chromothérapie" (c'était des chaises longues avec des lumières colorées), ou encore une pièce sombre qui s'appelait "la grotte de sel". Et en fait... ben, c'était un genre de sauna, mais en pas très chaud.

- Non mais attendez, faut aller dans la salle de sieste, c'est le meilleur truc!
- Y'a une salle juste pour faire la sieste?
- Ouais, avec des lits géants, et des matelas à eau!

Sauf que. Les matelas à eau. 

C'est confortable, hein, je dis pas. Mais. Quand on s'allonge dessus.

CA BLOUBLOUTE.

On a finalement réussi à garder notre sérieux que trois pénibles minutes, avant de devoir quitter la pièce pour cause de pouffage intempestif.

Et puis avec toutes ces conneries on commençait à avoir pas mal faim, mais malheureusement:

- On peut commander à manger?
- Heu... oui, enfin, quand le restaurant ouvre, à 18h30, vous pouvez commander à la carte. Notre chef étoilé a préparé une sélection de mets fins et délicats, qui raviront les papilles les plus exigeantes...
- Nan mais vous avez pas genre des Kit Kat?



(Insortables)

Ils en avaient pas, alors du coup on a recommandé des cocktails.

(L'esprit Sex and the City, toujours.)

- Bon les filles, je suis allée voir dans la pile de magazines si je trouvais pas un Cosmo pour qu'on puisse faire leurs tests débiles, mais y'avait que des magazines de design et des Madame Figaro.

- ....
- Par contre, je peux vous lire votre horoscope d'il y a quatre mois?

Et puis bon, comme on commençait à avoir bien la dalle, on est parties – au grand soulagement des gens assis derrière nous sur les transat, qui devaient en avoir un peu marre d'entendre les histoires de Sarah et de sa rééducation du périnée:

- Et je pouvais pas me retenir de péter! Je montais les escaliers à la maison, et à chaque marche, ça faisait prout, prout, prout!

(Le mot d'ordre de cette sortie : DIS-TIN-GUÉES.)

(J'ai précisé que mon sac était une taie d'oreiller?)

Et puis on a sorti nos culs de ploucs de cet endroit beaucoup trop classe, et on a appelé les garçons pour qu'ils commandent des sushi :

- Allô, Fla?

- WAAAAAAAAAAAA
- Tout se passe bien?
- Nickel!
- Qui c'est qui pleure, là? C'est Samuel?
- WAAAAAAAAAAAAA
- Oui, c'est Samuel. Et Auguste. 
- WAAAAAAAAAAAAA
- Et Arthur.
- WAAAAAAAAAAAAA
- Et.... ah, attends, Charlie vient de rejoindre le choeur.


(Grosse grosse hâte de rentrer.)

Je suis rentrée à la maison tellement relaxée que la tension a mis deux jours entiers avant de revenir dans mes épaules, autant te dire que c'était le pied total.

Tellement le pied que j'y retourne le mois prochain, parce que ça y est, Coralie a mis des paillettes dans ma vie avec ses sorties de bourgeoise, et maintenant comment je suis censée apprécier la douche chez moi qui est même pas sensorielle?

- Donc tu retournes au spa, mariner dans l'eau thermale toute la journée comme un vieux sachet de thé?
- Exact. Mais en compensation, mercredi prochain, j'amène les petits chez ma mère et j'y reste la journée.
- Super!
- Alors, t'as quoi au programme de ta journée de détente? Encore des jeux de gestion?
- Non, l'autre jour j'ai retrouvé mon identifiant Minecraft, et tu savais qu'ils avaient des DAUPHINS maintenant?
- ....
- J'veux dire, je suis OBLIGÉ d'aller voir ça, quand même!


(On ne changera pas ce grand gangster geek d'amour.)

(3615 référence de vieux.)

(Tu l'as?)

(Félicitations, bisou au coin de tes yeux ridés.)

lundi 16 septembre 2019

3615 ma folle vie palpitante


Et donc ça y est, mes bébés commencent enfin à être un peu intéressants.

Par "un peu intéressants", j'entends : "ils suivent les objets des yeux".

(Je sais, c'est pas grand-chose, mais rappelle-toi qu'on partait de "ils ouvrent les yeux cinq minutes par jour et ils regardent dans le vague".)

Ils commencent aussi à rester éveillés de plus en plus longtemps la journée, et excusez-moi on en parle de cette arnaque totale?

On en parle, du fait que tout le monde sans exception te dise "tu verras, c'est les premières semaines les plus dures" alors que TROP PAS, vu que les premières semaines, ils faisaient que manger et dormir, et que du coup on avait au moins quelques heures dans la journée où on était peinards, tandis que maintenant ils mangent tout aussi souvent, mais le reste du temps ILS NE DORMENT PLUS, MAIS POURQUOI?

D'autant que nos mômes semblent encore plus emmerdants que la moyenne un peu différents des autres, parce qu'ils ne dorment quasiment pas durant la journée. (Alors que, je le rappelle, à leur âge, ils devraient encore dormir 12 à 14h par jour.)

- Ah mais au moins ils font leurs nuits, c'est cool !

M'ont répondu des gens anormalement optimistes.

Ce à quoi j'ai répondu :



Bon, en vrai, on a quand même trouvé la bonne méthode pour pouvoir passer des nuits à peu près tranquilles : Flaxou et moi, on fait des équipes. Lui s'occupe des bébés pendant la plage 22h-4h, et moi je prends la plage 4h-10h. Comme ça, on arrive à dormir chacun environ six heures par nuit.

(Sauf incident de type "mon caca a débordé de ma couche et a rempli mon pyjama, et puis dans la foulée j'ai décidé de vomir sur mon frère".)

(Authentique).

Et c'est cool parce qu'on peut aussi suivre nos cycles de sommeil naturels, vu que Flaxou est de toute façon bien incapable de s'endormir avant une heure du matin, et que moi je me lève quoi qu'il arrive avec le soleil, en bonne petite mamie.

Toute cette organisation n'empêche quand même pas les nuits de merde de temps en temps, où Flaxou me retrouve sur les rotules à sept heures du matin, à pleurer en même temps que mon bébé:

- WAAAA!
- Mais pourquoi tu dors paaa-ha-ha-haaaaaa?
- WAAAAA!
- Maman est si fatigu-hé-hé-hé-hééééééé!
- WAAAAA!
- BOUHOUHOUHOUH!

Et je ne te raconte pas les moments de panique où les deux bébés réclament les bras, sauf que j'ai deux bébés et deux bras et il me faut deux bras par bébé, donc tu comprendras mon souci d'arithmétique.



Et puis n'oublions pas "l'heure chiante", ou, comme l'appellent les experts, "la décharge émotionnelle", qui est une heure en fin de journée où les bébés font que pleurer pour évacuer leur trop-plein d'émotions – un genre de reset avant de commencer la prochaine journée.

Et plus leur journée a été chargée (rencontrer de nouvelles personnes, passer de bras en bras, sortir faire une balade, voir une coccinelle) (oui ben c'est des journées de bébé, hein, c'est pas le ministre de l'Intérieur), plus ils gueulent fort plus la décharge est conséquente.

Et c'est en expliquant ce concept à ma mamie que je me suis rendue compte qu'on se faisait bien arnaquer, nous, les nouvelles générations:

- Donc tu les mets au lit pour les calmer?
- Non, ça ne marche pas, ça les énerve encore plus.
- Ah oui! C'était pareil pour moi. Au début, ils s'énervent, ils hurlent! Mais il faut attendre, ils finissent toujours par se calmer.
- Mais tu attends combien de temps?
- Oh, ça dépend des enfants. Avec ton père, c'était réglé en dix minutes. Ton parrain, il hurlait longtemps: une heure, deux heures...
- ....
- Mais souvent j'en profitais pour passer l'aspirateur, comme ça je l'entendais pas.
- ....
- Après, des fois, pour que ça aille plus vite, on prenait un lange, on le trempait dans le miel, et on mettait juste deux gouttes de schnaps par-dessus...



Ouais okay bon on va dire que c'était une autre époque.

Une époque où ça craignait un peu d'être un bébé, par contre c'était vachement plus facile d'être un parent.

(Des fois la vie est beaucoup plus simple quand on ne sait pas les choses.)

(Et qu'on peut cramer les neurones de son enfant en paix.)

Bref, nous on est à l'époque moderne, où soi-disant on ne peut pas laisser son bébé pleurer avant six mois sous peine de devoir payer quinze ans de psychanalyse ensuite, et je ne te cacherai pas que, certains soirs, quand j'ai un concerto en hurlement mineur dans les oreilles, j'ai un peu la sensation de m'être fait karna.

(Je suis à ça d'aller chercher le pot de miel et de leur inoculer le botulisme, et probablement le diabète aussi.)

Fort heureusement, les bébés ont développé un arsenal qui les protège à jamais de toute tentative d'abandon sur le parvis d'une église (ou autre mise à l'eau dans un panier, à la Moïse) : ILS ONT APPRIS A SOURIRE.

Et crois-moi qu'ils ont beau être tout petits, ils ont très bien compris comment s'en servir, cf. mes conversations avec eux à six heures du matin en leur changeant la couche:

- Tu as été très vilain cette nuit, Auguste! Tu as fait plein de caprices et tu as empêché maman et papa de dormir, c'est pas bien du tout! Maman est fâchée!

Mon bébé :



Moi :

- Oh mais t'es si BEAU mon bébé d'amour! T'es beau comme un astre! T'es beau comme un prince! Je vais te MANGER DE BISOUS! MWAH! MWAH! MWAH!

(La discipline est totale.)

Sur ce, je te dirais bien à bientôt, mais toi-même tu sais que mon temps libre est pas mal aléatoire en ce moment (dit-elle, écrivant ces mots à la hâte alors qu'elle entend des grognements en provenance de la chambre des bébés). Mais dans tous les cas, je compte bien revenir prochainement te parler de films, de spas, et de kirs framboise.

(Et de bébés, évidemment.)

A une prochaine, bises à ton chat, papouille sur ton chien!