jeudi 11 août 2022

Des nouvelles de Romulus et Rémus


Et sinon les grumeaux ça va toujours bien.

(Et non, y'a toujours rien d'autre dans ma vie à part mes enfants, merci d'avoir espéré pour moi, c'est gentil mais illusoire.)

Ça va toujours bien mais clairement c'est pas grâce à eux, vu que, si on les laissait aux manettes plus de trois minutes, ils seraient déjà morts mille fois.

(Merci la pédagogie Montessori de favoriser l'initiative personnelle, mais je pense qu'on va attendre un peu.)

Morts de quoi, tu me diras? Ah ben de plein de choses : électrocutés, tombés du balcon, écrasés par des voitures, tombés dans des précipices, bouffés par des chiens... le fun semble se trouver dans la variété du type de suicide.

Et on ajoutera aussi à cette catégorie "morts de faim", puisque les grumeaux semblent bien déterminés à bouffer pas grand-chose à part de la soupe à la grimace.

En fait, si on les écoutait, ils se nourriraient uniquement de pâtes à l'huile et de charcuterie (mais on a quand même une variation : l'un est plutôt jambon, l'autre plutôt cervelas) (qu'on ne vienne pas me dire que les jumeaux sont toujours pareils).

Avec Professeur Flaxou, on en avait tellement marre de passer des heures à se battre à chaque repas qu'on a même sorti le grand jeu : un livre P'tit Loup.


(Un tout petit échantillon de notre imposante collec)

P'tit Loup, si tu ne connais pas, c'est THE grosse vedette des livres pour 2-3 ans (ex aequo avec Tchoupi et Petit Ours Brun) (Oui, je sais, moi aussi j'étais surprise que ça existe encore, Petit Ours Brun). Il existe actuellement une bonne trentaine d'albums (mais y'en a un nouveau qui sort tous les 3 mois, c'est un rythme de production absolument dingue) et chaque album aborde un thème cher à cette tranche d'âge : P'tit Loup jardine, P'tit Loup fait une colère, P'tit Loup sur le pot, P'tit Loup n'aime pas ranger, etc.

Je suis tombée sur "P'tit Loup n'aime que les pâtes" et évidemment c'était du pain bénit. 


On leur a lu l'histoire plein de fois pour qu'ils comprennent bien qu'à la fin, P'tit Loup essaye les lasagnes aux légumes et il aime beaucoup ça, et que c'est important de goûter à tout, et tout le toutim.

(Le livre finit quand même sur P'tit Loup qui dit "les légumes, c'est bon pour ma santé", je pense que c'est plutôt clair.)

Et le même jour, quand Auguste va chercher le bouquin pour son "temps lecture" du soir, je l'entends se conter le truc :

- Maman dit "il faut goûter". Petit Loup dit "moi c'est les pâtes que je préfère". Mmmmm, c'est bon les pâtes! Fini!


(En fait le gosse réécrit ses propres fins.)

(Il fait de la fanfiction OKLM.)

Au final, on a quand même réussi à les persuader à goûter à tout ce qu'on leur présente, grâce à un trait de génie qui m'est venu tout droit des mamies:

- Je peux avoir une tartine de Kiri?
- T'as pas touché à tes légumes. Il faut les goûter pour avoir le droit de passer à la suite. 
- Mais je veux paaaaaas!
- Dis-moi, tu as quel âge?
- Euuuuh deux ans!
- Alors il faut manger deux cuillères, comme tu as deux ans. Tu y arrives?
- Oui!
- Oh, et dis-moi, c'est bientôt ton anniversaire, non?
- Ouiiiii!
- Et tu auras quel âge?
- Euuuuh TROIS ANNNNS!
- Ah ! Alors, dans ce cas, est-ce que tu penses que tu es assez grand pour manger déjà TROIS cuillères? 
- Ouiiiiii!


(Heureusement qu'ils sont pas fute-fute, sinon on gagnerait jamais.)

En parlant de gagner, y'a un grand perdant dans cette grande aventure de l'éducation, et c'est mes principes.

(Je dirais bien "nos principes" mais Professeur Flaxou, contrairement à moi, ne s'est jamais fait beaucoup d'illusions.)

J'ai plutôt bien géré le "pas d'écrans avant trois ans" que recommandent tous les spécialistes de la petite enfance, et quand je dis "j'ai plutôt bien géré" ça veut dire que j'ai tenu presque deux ans avant de laisser tomber.

Maintenant, les gamins se tapent une-demi heure de dessins animés par jour, et ça c'est en semaine, parce que le week-end ils vont manger chez mamie et c'est open bar:

- Mamie tu mets la téléééééé?
- Bien sûr, mon lapin.
- Bon, je vais prendre une douche vite fait, et je reviens.
- Mais tu sais Charlotte, tu peux les laisser tout le temps que tu veux! Ils sont tellement sages! Moi ça ne me fait pas de travail du tout! Laisse-les toute la matinée même, si ça t'arrange, moi je suis tellement contente de les avoir! Regarde comme ils sont sages et comme ils se tiennent bien!

Les enfants:


(Ah, ça pour être sages.)

Ce qui nous sauve un peu pour le moment, c'est que, comme on n'a pas la télé à la maison (ils regardent leurs dessins animés sur Netflix via le PC ou mon téléphone) c'est facile de leur faire croire que le choix de dessins animés est beaucoup plus limité à la maison:

- Allez, on sort du bain! On va s'habiller en regardant Puffin Rock.
- Tu peux mettre Peppa Pig?
- Ah non désolée mon chou, Peppa Pig c'est que chez mamie, et c'est que le matin. Le soir chez mamie la télé ne marche pas.
- Ah d'accord.


(J'en profite tant que ça dure.)

(Avec un peu de chance, d'ici à ce qu'ils flairent l'arnaque, ils seront trop grand pour cette abomination qu'est Peppa Pig.)

(Et avec beaucoup de chance, on pourra peut-être naviguer l'écueil de la Pat'Patrouille en prime.)

(Laisse-moi rêver.)

J'ai également réussi à tenir jusqu'ici sans les taper (même si, des fois, le p'tit taquet à l'arrière de la tête me démange sa mère) mais clairement, pour l'éducation bienveillante, on repassera:

- Mets tes chaussures.
- Je veux pas mes sandales! Je veux mettre mes baskets!
- Il fait 39 degrés, tu mets tes sandales, sinon tu vas avoir trop chaud aux pieds.
- Mais non j'aurai pas chaud!
- Mais si t'auras chaud! Mets tes sandales!
- Nan!
- Bon tu sais quoi, je m'en fiche, mets-les tes baskets, mais alors va chercher tes chaussettes.
- NAAAAN! JE VEUX PAS DE CHAUSSETTES! 
- Alors mets tes SANDALES!
- NAAAAN!

Et là normalement, selon l'éducation bienveillante, on est censés emprunter l'un des chemins suivants :

1. On prend le temps de se calmer et de discuter de la situation à tête reposée, en expliquant bien à l'enfant le raisonnement derrière notre décision afin qu'il arrive lui-même à la même conclusion que nous.

2. On le laisse mettre ses baskets sans chaussettes, et tant pis s'il a des ampoules, la prochaine fois il comprendra.

Ou alors, on fait comme moi et on gueule:

- BON MAINTENANT CA SUFFIT LES CAPRICES TU TE TAIS ET TU ME DONNES CE PIED! J'EN AI RIEN A FAIRE C'EST MOI QUI COMMANDE ET SI T'ES PAS CONTENT C'EST LA MÊME CHOSE! ET TOI LA-BAS TU ARRÊTES DE JOUER AVEC TON ZIZI PENDANT QUE JE GRONDE TON FRÈRE! MAINTENANT TOUT LE MONDE DANS LA VOITURE ET ON VA ALLER PASSER UNE SUPER JOURNÉE A CIGOLAND!

(Oui, une fois que la gueulante a commencé, il faut un temps avant que le volume redescende.)

Et pour celles et ceux qui se disent à cet instant "Heu, on en parle de cette phrase avec le zizi, ou bien?" eh bien c'est simplement parce que, depuis que mes gamins n'ont plus de couches, ils se tripotent constamment.

Déchirée entre ma peur de les complexer et d'en faire des frustrés et des pervers, et mon envie de ne me pas me taper la honte en public rien qu'une seconde de ma vie, j'ai quand même posé quelques principes de base:

- Ce n'est pas poli de se toucher le zizi devant les gens. On peut le faire quand on est tout seul à la maison, mais c'est tout.
- Mais moi je trouve que c'est rigolo de faire un tout gros zizi!
- Ben t'es bien le fils de ton père.
- Quoi?
- Rien. Je t'aimerai pour toujours. Même si tu deviens chelou.

Par contre, dans le cadre de l'acquisition de la propreté, ils ont passé l'essentiel de l'été dehors en slip ou cul-nu, et ça a créé des situations que j'avais honnêtement jamais vu venir:

- Quelle bonne idée d'avoir acheté cette petite pataugeoire!
- Ouais, au moins on peut se rafraîchir un peu pendant la canicule.
- Papa, regarde! Mon zizi a disparu!
- Qu'est-ce que.... SORS TON PÉNIS DE CET ESCARGOT TOUT DE SUITE!


(C'était juste une coquille vide.)

(Dieu merci, c'était juste une coquille vide.)

(Non parce que si déjà je dois commencer à économiser pour dix ans de thérapie, j'aimerais ne pas avoir à dédommager l'escargot en sus.)

Donc sinon, à part les incidents zizi, les enfants sont à peu près propres, s'habillent seuls, se lavent seuls, dorment dans un lit de grand, enfin bref, ils ont complété leur transition et ne sont officiellement plus des bébés.

Sauf quand ça les arrange, évidemment.

- Maman, tu poooooortes!
- Mais enfin Sammy, je ne vais pas te porter dans les escaliers, tu es beaucoup trop lourd! Et puis tu es grand maintenant.
- Mais non... Ze suis ton petit bébé. 

Moi:


- Oooooh mais bien sûr, viens dans mes bras tout de suite mon petit bébé d'amour.

Fla qui contemple la scène:


J'y peux rien, ces enfants ne sont pas vraiment expressifs dans leur affection. (Ce qui est le comble vu leur papa qui me répète que je suis belle et qu'il m'aime dix fois par jour.) (J'adore comme j'écris ça en mode ça me saoule, comme une sale connasse.) ("Oh nan, mon mec est beaucoup trop démonstratif! Tout le temps en train de me faire des bisous, de me prendre dans ses bras, de me dire à quel point je suis géniale, nan mais au s'cours".)

Bref, je dis à mes gosses que je les aime tous les jours, et en trois ans, ils ne me l'ont pas dit une. seule. fois.

(Tout juste avais-je droit à un petit "moui" du bout des lèvres quand je partais à la pêche en mode "Je t'aime, mon petit chou. Et toi, tu aimes ta maman?" comme une crevarde.)

Et je m'étais résignée à ce que leur affection ne soit délivrée que sous la forme d'un petit câlin mollasson et d'un bisou mouillé de temps en temps, quand un jour, sorti de nulle part, le miracle:

- Maman, je veux encore du ketchup!
- Il manque le mot magique.
- S'il te plaîîîîît!
- C'est bien. Voilà du ketchup.
- Merci! Tu sais maman moi je t'aime très fort.

Moi:


Et maintenant, ça les prend de temps en temps de le dire aux moments les plus aléatoires : pas quand on fait un câlin, pas quand je leur dis bonne nuit, mais par contre j'ai eu droit à des "maman je t'aime" en faisant les courses, au milieu d'un repas, en voiture, ou même pendant qu'ils étaient en train de pisser sur leur pot.

(Je prends ce qu'on me donne.)

Sinon, une question qu'on me pose souvent concernant mes enfants, c'est "qui est le meneur?"

(Pas "est-ce qu'il y a un meneur?", tu noteras.)

Je suppose que c'est une question qu'on se pose plus avec les jumeaux, vu qu'avec les enfants d'âge différents, on part du principe que l'aîné est le leader (ce qui est déjà un postulat merdique). Perso, je trouve ça tout aussi merdique de penser qu'il y a forcément un meneur et un suiveur dans une paire de jumeaux, et ça m'agace encore plus quand les gens me disent comme une évidence:

- Ha, ce Auguste, on voit que c'est le meneur, hein! Il a un sacré caractère!

(Malus x1000 : quand les gens me disent ça DEVANT les mômes.)

(Prophéties auto-réalisatrices, tout ça.)

Alors, que ce soit dit: oui, certes, j'ai un enfant qui a un caractère de cochon.

(Quelle idée aussi de lui donner un nom d'empereur.)

("Mais c'était un des bons empereurs!" Bah heureusement hein, tu voulais pas qu'on l'appelle Caligula quand même?)

Et oui, c'est vrai, Samuel est une assez bonne pâte avec son frère, et a tendance à céder à ses caprices pour lui faire plaisir (ou simplement le faire taire) avec une facilité déconcertante, et, souvent, malgré notre intervention.

(Genre quand Samuel chope le dernier yaourt à la framboise, qu'Auguste pète une pile, qu'on lui rappelle que la dernière fois c'est lui qui a eu le dernier et qu'il faut partager, et d'un coup, Samuel nous dit "en fait moi je voulais le yaourt à la fraise, j'ai changé d'avis, tiens Gus-Gus tu peux prendre le mien".)

Et on pourrait croire, de prime abord, que mon Sammy est une pauvre victime qui se fait constamment bolosser par son frangin tyrannique, mais ce serait bien mal connaître ces gosses.

(D'autant que, même à moi, il y a plein de choses qui m'échappent dans leur dynamique.)

Quoi qu'il en soit, c'est hyper réducteur de faire d'Auguste le leader de facto, quand tous les jours, j'ai droit à ça:

*au réveil, immédiatement* Il est où Sammy?

*au moment de mettre les chaussures*
- Tu veux tes Crocs ou tes sandales?
- Il a quoi, Sammy?

*au moment du goûter*
- Tu veux une tartine de confiture ou de chocolat?
- Il prend quoi, Sammy?

Et ainsi de suite, et ainsi de suite.


(Auguste quand son frère va pisser.)

Pour résumer : y'a pas de meneur, ils s'influencent tous les deux l'un l'autre, et pour ma part, je retrouve la configuration que j'avais prévue dès le début: un Président charismatique qui fait croire à tout le monde qu'il est confiant et décideur, et une éminence grise qui conseille dans l'ombre. 

(Ce sera un peu les Sarkozy et Patrick Buisson, mais sans le côté facho) 

(Ou bien les jumeaux Kaczynski, mais.... aussi sans le côté facho.)

(Bon, ou alors comme un Miterrand et François de Groussouvre.... mais sans le côté facho.)

(Okay okay, alors ce sera comme Nixon et Henry Kissinger, mais....okay tu sais quoi, oublie.)

(Je vais laisser Professeur Flaxou en faire des scientifiques, finalement.)

1 commentaire:

  1. Quel plaisir d'avoir des nouvelles des jumeaux ! :)
    J'avoue que la question "Qui est le meneur ?" ne me serait pas un instant venue à l'esprit ! Bizarre qu'on te la pose aussi souvent...

    Comme d'habitude, c'était bien drôle :) (J'avoue que j'ai un coup de coeur particulier pour "sors ton zizi de cet escargot !", qui est une phrase absolument magique).

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