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vendredi 28 mai 2010

Don't they know it's the end of the world

 (Eh ouais. Des vrais toits en chaume. Ça c'est quand même super classe.)


Bon, alors je pars dans deux jours. 

Mes valises ne sont absolument pas prêtes. Enfin si, j'ai une valise pleine à craquer de fringues et de dictionnaires, mais j'ai pas pu remplir ma deuxième valise (celle pour les chaussures et les romans) parce qu'elle sentait le vomi. Comment ça se fait que ma valise sente le vomi, j'en ai aucune idée, en tout cas c'est pas moi qui ai vomi dedans (je pense que je m'en souviendrais). Je doute aussi que ma coloc soit entrée dans ma chambre pendant mon absence pour le seul but de vomir dans le coin où je mets les sacs de voyage. Et on n'a pas de chat. Le mystère reste entier. (Du coup mon sac s'apprête à passer la nuit dehors, arrosé de Fébrèze.)

Bref. 

Le plan de départ, c'était : avoir l'air triste de partir pour ne pas froisser mes collègues qui sont des gens super, mais jubiler intérieurement : plus de cours! Plus d'entraînements aux oraux avec mes sous-doués du bocal! Plus besoin de les entendre répéter "Je aller le piscine" trois fois par jour avec des envies de meurtre, parce que j'ai passé les six derniers mois à leur apprendre à conjuguer le verbe "aller" au présent de l'indicatif. Plus de Kettering! Plus besoin de prendre le train pour aller au cinéma! Plus besoin de passer mes samedis soirs en pyjama devant les Experts! (En France je le ferai quand même, mais ce sera par CHOIX.)

Adieu, grisaille de l'Angleterre, adieu ces murs de brique que je trouvais si mignons en arrivant et qui me sortent par les orbites. Adieu les repas du pub qui semblaient si exotiques à mon arrivée (et maintenant j'ai la nausée rien qu'en voyant les mots "sausages and mash"). Bonjour, l'Alsace! Tes vignes verdoyantes, tes châteaux, tes villes fleurant bon la culture et la jeunesse. (C'est pas qu'il y ait pas de jeunes ici. C'est juste que c'est des jeunes un peu plus jeunes. Genre, entre 1 et 10 ans, ce genre de jeunes.)

Bonjour aussi Professeur Flaxou qui se meurt lentement d'ennui à Nancy (tu m'étonnes. Peu importe si on en est loin ou proche, être hors d'Alsace, c'est toujours une épreuve.) Bonjour mon papa et ma maman, bonjour ma soeur et mon chat, bonjour mon ours en peluche de trois mètres de haut.

La fête, quoi. Une semaine que je me trémousse tous les matins sous ma douche en chantonnant "Bientôt je serai en France-euh, bientôt j'aurai une douche avec de la pression même si je suis au deuxième étage-euh!"

C'était plutôt bien parti. 

Mais aujourd'hui, pour mon dernier jour, mes élèves de Year 11 (équivalent de la Seconde) m'ont offert une carte presque aussi grande que moi, et truffée des fautes d'orthographe les plus adorables que j'ai vues de ma vie, en me disant "Tu vas manquer nous." 


(Je vous conseille vivement de cliquer pour voir l'image en grand. Les dessins valent surtout le coup.)

Alors je leur ai fait la bise à chacun et ils sont devenus tout rouges (bande de prudes). Et puis Matthew, mon élève préféré (je sais, je devrais pas avoir de préféré, mais je suis humaine après tout, et il joue de la guitare) m'a prise à part et m'a offert un paquet de Maltesers et un CD des Red Hot Chili Peppers en me disant "Je suis triste parce que c'est dernier jour de tu." 

Et j'ai eu une bête envie de pleurer, alors que c'est débile, je veux même pas faire prof, mon avenir glorieux d'interprète/traductrice/diplomate (selon la branche dans laquelle ils m'acceptent à l'ITIRI) /assistante en Russie (selon si l'ITIRI m'accepte pas du tout) me tend les bras, et moi je suis là à regretter quatre morveux qui vont m'oublier dès qu'ils auront le dos tourné. Conne.

Alors j'ai pris une grande inspiration et je me suis dit, maintenant ça suffit les bêtises, pense à tout ce que tu vas retrouver, pense comme ça sera bien de plus avoir à enseigner! Quel bonheur et quelle simplicité de redevenir étudiante, de devoir juste s'asseoir et absorber le savoir, au lieu de devoir le diffuser dans des crânes d'oeufs!

Ça m'a remonté le moral. 

Mais ensuite je suis allée faire ma toute dernière heure de cours à l'école primaire, et ils m'ont donné ça :



Voilà, c'est malin.

Maintenant, je veux plus partir.

vendredi 14 mai 2010

Vis ma vie au pays des bisounours



Les Anglais aiment la sécurité.

Je te jure que même à Colmar, capitale des vieux bourges, je me sens moins en sécurité qu'ici. Et pourtant ici c'est censé être la zone. (J'ai pas vu un seul gars chelou depuis que je suis arrivée, à part le mec qui est toujours assis devant le magasin de fish&chips. Et encore, je crois que c'est parce qu'il connaît le gérant.)

Les Anglais aiment bien veiller à notre confort. Parfois je me dis qu'on doit leur sembler vachement inconscients.

Quand je suis arrivée chez Edwina, j'ai remarqué que la lumière de la salle de bain ne s'allumait pas en appuyant sur un bouton, mais en tirant sur une ficelle. C'est parce que la loi anglaise exige que touts les interrupteurs des salles de bains soient au plafond, pour éviter les risques d'éclaboussures. Et puis, la première fois que j'ai voulu me sécher les cheveux, j'ai remarqué un truc marrant :

- Dis donc Edwina, y'a pas de prise dans la salle de bains?
- Ben non. Pourquoi il y en aurait?

Et c'est normal! Ça aussi c'est interdit! C'est parce qu'ils ont trop peur de se faire Claude-Françoiser avec un lisseur!

(Maintenant on sait d'où vient ce cliché des Anglais aux dents pourries : c'est parce qu'ils n'ont pas le droit d'avoir des brosses à dents électriques.)

Donc maintenant, je suis déchirée : d'un côté je me dis que toute la population française frôle la mort, chaque matin, entre les tartines et le café, et qu'on et quand même drôlement braves, et d'un autre côté je me dis que les Anglais sont peut-être un tout petit peu trop soucieux de notre bien-être de tous les instants.

L'autre jour je voulais montrer un film français à mes élèves de 15 ans. Comme ils avaient déjà subi "les Choristes", je m'étais dit que j'allais faire remonter les films français dans leur estime, et j'ai décidé de leur visionner "Le dîner de cons". (N'oubliez pas, ils ont 15 ans, il faut que ça reste simple.) La prof m'ayant prévenu que, les restrictions n'étaient pas les mêmes en France et en Angleterre, il fallait que je fasse très attention à toute scène un peu chaude : sexe, nichon, morceau de fesse, voire même allusion voilée. Ce à quoi j'ai rétorqué que si on enlevait les allusions au sexe, il ne restait qu'un seul film en France, et c'était "les Choristes".

Ce que je n'avais pas pris en compte, en revanche, c'étaient les gros mots.

Il faut savoir qu'en Angleterre, les gros mots, c'est une affaire d'Etat. En fait n'importe quelle démonstration d'une quelconque émotion est choquante. Jugez plutôt :


Non mais sérieusement, je sais même pas ce qu'ils entendent par "  emotionally intense scenes".   Ils pleurent dans les bras l'un de l'autre? Ça va choquer nos têtes blondes? Et puis, interdire une comédie romantique aux moins de 12 ans, y'a pas du foutage de gueule dans l'air? ("Oh no, people having intercourse out of wedlock! We must alert the church elders!")

Maintenant, jugez de la joie de mes élèves (qui, je le précise, n'ont même pas le droit d'acheter des JEUX A GRATTER à leur âge) quand ils sont tombés sur la séquence que j'avais oubliée, française que je suis ayant été élevée dans les "putain" et autre "fait chier bordel de merde". En quinze secondes chrono, ils ont eu droit à "p'tite bite", "couille molle", "aux chiottes l'OM", "va te faire foutre", "enculé" et "connard". Tout cela bien entendu sous-titré dans l'allégresse générale.

(J'ai dû leur faire promettre de passer cet incident sous silence, sinon j'aurais plus jamais eu le droit de leur montrer un film. Et notez bien que je ne bosse pas dans le privé, là-bas j'aurais été virée pour un coup pareil.)

Ce que je trouve le plus incroyable, c'est quand même que, pour se faire une plus grande marge d'audience, certains distributeurs consentent à ce que les gros mots soient bipés DANS LES CINEMAS ! (C'était par exemple le cas pour "Iron Man 2". Pas un endroit en Angleterre où tu pouvais entendre Robert Downey Jr. dire "motherfucker". Ce qui enlève quand même un certain sex-appeal au personnage.)

C'est quand même dingue. Avec des critères pareils, tu m'étonnes que mes élèves n'aillent jamais au ciné. Moi, à leur âge, je me gavais de pop-corn et de films d'horreurs jusqu'à en avoir les rétines qui se décollent et les dents qui se déchaussent. Si j'avais été anglaise, j'aurais loupé ce passage obligé de l'adolescence débile, et je serais arrivée à 21 ans, mature et responsable, et j'aurais jamais vu un seul film de zombies. 

Ma vie aurait été trop moche !

En bref : merci le CSA d'être aussi permissif avec les interdictions des films, sinon je ne serais pas la personne que je suis aujourd'hui. Je serais un bisounours sauce à la menthe. Et pour ça, je remercie la France, cher pays de mon enfance, de n'avoir pas contrôlé mon âge quand je suis allée voir mon premier Tarantino au cinéma. Vous m'avez sauvé la vie.


PS :  Non mais y'a pas que moi que ça choque, rassurez-moi ?

PPS : Vous m'excusez mais je me défoule ici : FUUUCK FUCKFUCKFUCKFUCKFUCKFUCK FUUUUUUUUUUUUCK !!!

lundi 10 mai 2010

Wales



Mes enfants, plus je reste en Angleterre et moins je comprends. 

Par exemple, je ne comprends pas comment un voyage en train peut me coûter 27£ à 11h50 et 52£ à 12h05, alors que c'est le même voyage, le même jour. (Ça m'apprendra à actualiser mes pages internet.) 

Vendredi dernier, quand mon train était coincé pendant une heure quarante-cinq à Gloucester, j'ai pas tout compris non plus. D'abord on nous a dit "Ce train est bloqué parce que le train avant nous a eu un accident, on va rester en gare et voir ce qui se passe". Ensuite on nous a dit "C'est trop tard maintenant, on doit rentrer à Birmingham, sortez de ce train et prenez le suivant." On a pris le suivant qui évidemment était bloqué aussi, et on aurait sans doute continué les chaises musicales comme ça toute la nuit si on n'était pas repartis.

Maintenant, il faut quand même que vous sachiez quel genre d'accident c'était. Alors le train, il a percuté une vache. Ça arrive. En Alsace ça arrive même souvent. Donc c'est sûr que ça met du temps, il faut appeler les pompiers pour qu'ils nettoient les bouts de steak haché collés au train, tout ça. Mais ça met JAMAIS deux heures. Seulement là le clou du truc, c'est que la vache n'était pas morte ! (Soit les trains anglais c'est des lopettes, soit les vaches elles ont de l'adamantium dans leur squelette, je sais pas lequel des deux.)

Du coup les voilà avec une vache bien mal en point quand même en train de bloquer les rails. Alors, qu'est-ce qu'ils ont fait? Ils ont appelé un vétérinaire. 

Des fois, la compassion anglaise, elle fait un peu chier. Un vétérinaire? Non mais attends c'est une vache, elle vient de se faire pécho par un train, comment te dire? C'est foutu! Elle va mourir de toute façon, c'est une question d'heures! Si tu as un peu de compassion pour la vache et pour les passagers, tu recules ton train et tu lui roules dessus une deuxième fois, et on n'en parle plus, et les gens qui veulent rejoindre Adèle à Cardiff peuvent rejoindre Adèle à Cardiff (surtout si c'est eux qui ont les réservations pour la chambre).

Le truc le plus hallucinant c'est que les autres passagers trouvaient leurs malheurs bien peu de chose à côté de l'histoire de la vache, et qu'ils demandaient régulièrement des nouvelles au conducteur sur l'état de santé du ruminant, suivi de "oh j'espère qu'elle va s'en sortir". Alors là j'ai loupé un épisode : la vache, elle est de ta famille? Ou bien c'est un truc anglais d'animaux sacrés, comme les cygnes, et si la vache meurt il faut faire deuil national? Non mais je rêve.

(Il me sera vraiment tout arrivé avec les transports. La neige, les volcans, les vaches. Je suis maudite.)

Finalement je suis arrivée à Cardiff, auprès d'Adèle qui m'attendait misérablement dans un Burger King depuis deux heures, et là a débuté notre grande aventure au Pays de Galles.

Le Pays de Galles c'est un vrai pays séparé, mais ils ont quand même la reine, Gordon Brown et les livres sterling. Mais ils ont leur propre langue en plus de l'anglais, ce qui fait que tout est traduit partout : dans les gares, aux arrêts de bus, sur les noms des rues, sur les panneaux du Tesco, même sur les étiquettes H&M ! (Ils poussent le vice.)

 (Traduire "Debenhams" par "Debenhams"? Vraiment?)

Cardiff, on n'en a vu que le centre et la pharmacie, parce qu'Adèle est aussi maudite de la vessie que moi des transports. Du coup, pendant tout le week-end, j'ai eu droit à des mises à jour "la vessie d'Adèle" : J'ai pas encore trop envie de pisser. Là j'ai envie de pisser. Là je viens de pisser mais je dois quand même y retourner. Et ainsi de suite.

Après les dix-huit passages aux toilettes, on était prêtes pour passer un week-end de ouf à Swansea!

Swansea, je vous le dis tout de suite comme ça vous éviterez les pièges si jamais vous voulez y aller : c'est moche. N'y allez pas. Sauf si vous voulez faire du shopping, là c'est bon. Mais bordel, que c'est moche. Mais de toute façon, nous, on n'avait pas prévu de visiter Swansea en elle-même, mais la magnifique et sauvage côte de Gower (accessible en bus depuis Swansea, d'où le fait qu'on restait là-bas). 

Le samedi, on est parties bourrées de bonnes intentions à travers la lande, malgré la pluie, le vent et les six degrés Celsius, pour visiter les trésors archéologiques de la région.

Adèle joue avec les codes de la mode en osant le pull au-dessus du manteau!

On a commencé par Arthur's stone, un dolmen très très vieux. Je pense qu'il s'appelle Arthur's stone parce qu'il y a un creux dans le rocher qui fait la taille et la largeur d'une lame d'épée, ça laisse rêveur. 


Ensuite on a décidé de revenir à l'arrêt de bus pour voir la plage (toujours par des températures frisant le degré Kelvin), mais à la place on s'est dit que ce serait cool de se perdre dans les marais, aussi. Du coup on s'est perdues dans les marais. 

On a finalement atteint l'arrêt de bus, les pieds mouillés et froids, et on a attendu, mais le bus est jamais venu. (A moins qu'il soit venu avec vingt minutes d'avance, ce qui n'est pas impossible dans ce pays, mais alors à ce moment-là à quoi bon mettre un horaire, je vous le demande bien.) Du coup, afin de pas mourir gelées, on a décidé de faire du stop, mais les gens ici étaient tellement pétés de thunes qu'ils ne conduisaient que les coupés de branleurs à deux places (En plus y'en avaient qui nous faisaient des signes suggestifs du genre "va trouver un boulot hippie". Toute façon je serais pas montée dans ta voiture d'ennemi du peuple. P'tite bite.) 

Et les rares voitures normales avaient déjà du mal à avancer à cause des vaches sauvages.


Du coup on a attendu une heure et quart dans le froid, le pouce tendu, les extrémités bleues, et c'est là qu'on s'est faites attaquer par un faisan. (Il avait dû nous suivre d'Oxford.) On a entendu un bruit d'ailes sur le mur au-dessus de nos têtes, et il était perché là, et quand il nous a vu il nous a foncé dessus, toutes plumes dehors, dans un gloussement de mort, alors on a hurlé comme des malades et il est allé se poser en face de nous. (Je suis sûre que c'était pour mieux nous surveiller. Saloperie de grosse poule.)

Finalement personne ne nous a prises en stop, mais on a réussi à choper un autre bus qui nous a amené à la plage. Tout est bien qui finit bien.

Le lendemain, on est allé explorer des falaises (vu qu'on avait pas assez mis notre vie en danger samedi avec l'incident du faisan maléfique). Ce coup-ci il faisait un temps magnifique, alors on a flâné plus que de raison entre les dunes, la plage et les falaises couvertes de fleurs (trop romantique)


On a tellement flâné qu'ensuite on s'est rendu compte qu'il fallait qu'on prenne le bus dans une-demi heure à un emplacement totalement inconnu et qu'on était au milieu de nulle part. Du coup on a tracé à travers dunes et ruines de château, on a traversé un club de golf et ce qui était sans doute le jardin de quelqu'un, on s'est retrouvées sur un chemin de terre au milieu d'un village, et comme on était un peu désespérées, on est allé demander notre chemin à un couple qui passait en voiture. Lesquels nous ont répondu qu'ils allaient justement à Swansea et qu'on avait qu'à monter avec eux.
(Moralité : ne cherche pas à faire du stop, le stop viendra à toi.)

On est retournées à Cardiff, on a fait du tourisme dans une boutique de souvenir et dans une boutique de comics (on ne se refait pas), on a aussi trouvé des magasins aux noms obscènes :

 (Oh oui, fais-moi des choses avec une baguette)

Et finalement, bien malgré nous, on a chacune pris le train pour nos destinations respectives. Sauf que moi j'ai dû prendre le bus au milieu du chemin parce qu'il y avait des travaux sur ma ligne. (Maudite, je vous dis!)



PS : Eh c'est la grève des commentaires? Vous vous croyez sur Facebook ou quoi?

mercredi 5 mai 2010

C'est le pays joyeux des enfants heureux




Je vous avais déjà parlé de cette étrange coutume anglaise qui consiste à montrer son ticket de train sans que le contrôleur le demande, poussés par un fougueux besoin de prouver qu'ils suivent les règles. Eh ben accrochez-vous à vos culottes, parce que j'ai encore plus incroyable. 

Tout d'abord : les Anglais ont une politesse tellement hors du commun qu'il est très difficile de leur dire quoi que ce soit. Le problème étant qu'ils sont tellement versés dans l'art du "small talk" (babillage sans importance, mais nécessaire pour ne pas passer pour un mufle) que, pour les malotrus français que nous sommes, ça relève de la concentration la plus absolue pour finir une conversation :

- Bonjour, Sue...
- Oh, bonjour Charlotte! Ca va?
- Oui oui, ça va bien. Je voulais juste dire...
- Tu as passé un bon week-end?
- Oh oui c'était sympa, j'étais à Oxford, j'ai pleuré sur la tombe de Tolkien, rien de bien terrible. Bref, je voulais...
- Ça c'est drôlement rafraîchi aujourd'hui, tu ne trouves pas?

Attention, point de Godwin de la conversation anglaise : le temps.

Le temps est tellement instable en Angleterre que cela en fait, semble-t-il, un sujet de conversation des plus fascinants. (Le job le plus facile au monde : présentateur météo en Angleterre. "A l'Est, des pluies, peut-être, et du soleil l'après-midi, mais ça pourrait aussi bien être couvert". Je vous mens pas.) On peut ainsi disserter tous les jours, que dis-je, toutes les heures, sur le temps qui n'est pas de saison, cette maudite pluie qui n'en finit pas, ou encore ce beau soleil "mais on sent bien que ça va pas durer ma pauv' dame". 

Prêtez aussi attention à l'art de l'anglais pour enfoncer des portes ouvertes sans le moindre scrupule : par exemple, si on est à l'intérieur, on entendra très souvent : "Oh, il fait bon ici, c'est bien meilleur que dehors!" La chose parfaitement sidérante, c'est qu'ils arrivent à dire ça tous les matins. Alors qu'ils travaillent toujours au même endroit! On penserait qu'ils pourraient s'y attendre, mais non! En fait, les Anglais prennent la vie entière comme une agréable surprise. 

- Ce matin je suis monté dans ma voiture et elle roulait super bien!
- Ah bon? T'as des problèmes avec, d'habitude?
- Non, je trouve juste ça génial!

Je dois avouer que c'est un optimisme assez grisant, surtout quand on compare avec le râlage constant bien de chez nous. (Les Anglais, ils savent pas râler. Ils ont même pas de mot pour "râler"!)

Par contre, petit écueil à connaître : un Anglais voudra toujours avoir la dernière politesse. Laissez-le faire sous peine d'un boucle infinie.

- Ok donc on fait comme ça.
- Super, alors à lundi.
- A lundi!
- Bon week-end!
- Toi aussi!
- Salut!
- Salut! Et merci d'avoir appelé!
- Je t'en prie.
- Mais si, mais si. 
- Bon allez, salut!
- Salut! Prends soin de toi!
- Et toi aussi!
- Embrasse ton chien!
- Dis bonjour aux enfants de ma part!

Vous voyez où je veux en venir.

Imaginez-vous pendant une minute un pays où tout le monde est sympa. Le calvaire! Même les caissières te tapent la discute! Même (et là vous allez pas me croire) les gens de l'administration.

L'administration, la chose la plus redoutée des français avec la mort et le cancer du poumon. J'ai dû refaire mon passeport récemment, et quelquefois, la nuit, je rêve encore que je suis pourchassée par des actes de naissance et des justificatifs de domicile. 

Quand je suis arrivée ici, on m'a demandé de m'inscrire pour la Sécu nationale. Il y avait une agence à Kettering, mais, pour des raisons inconnues, on m'a demandé de me déplacer à Bedford (à 50 km de là). Ça commençait tout pareil qu'en France, et je m'inquiétais déjà.

Je me suis rendue à l'agence le cœur battant, tous mes documents sous le bras. J'ai indiqué à la secrétaire que j'avais rendez-vous pour qu'on me fasse ma Sécu (ils prennent rendez-vous dans ce pays! Pas de tickets de boucherie ni rien! le bonheur!) et je me suis installée pour attendre. 

Ben tu me croiras ou pas, mais j'ai à peine eu le temps d'ouvrir mon bouquin qu'on m'appelait déjà.

Je me suis retrouvée devant une dame souriante, déjà ça m'a fait un peu tiquer, mais après tout elle était peut-être sous Lexomil. Elle m'a fait asseoir, elle m'a demandé ma carte d'identité, et elle a rempli les formulaires à ma place. (Pays d'assistés.) Et puis elle m'a dit :

- Bon, tout est en ordre. Vous devriez recevoir votre carte Vitale d'ici six à sept semaines. 

Je n'en croyais pas mes oreilles.

- C'est fini? Au bout de cinq minutes?
- Oui.
- Vous êtes sûre qu'il n'y a aucun problème avec mon dossier?
- Ben non. 
- Mais vous avez même pas regardé mes papiers! Vous voulez pas voir mon justificatif de domicile? Mon contrat de travail? Mon permis de conduire? J'ai tout amené!
- Oh, ne vous inquiétez pas, on n'en a pas besoin, on vous fait confiance.

(A ce stade-là mes oreilles s'étaient mises à saigner.)

Puis, en me rendant ma carte d'identité, elle a poussé un petit soupir. J'ai eu un petit sursaut de joie. Enfin, un truc qui n'allait pas, une habitude à laquelle me raccrocher. Elle allait me dire que le plastique de ma carte n'était pas conforme aux normes anglaises et que je devais la faire replastifier, j'allais perdre des mois, et tout irait bien. Et là, elle a juste dit :

- Vous avez vraiment un joli sourire sur cette photo, c'est très agréable! Nous, on n'a plus le droit de sourire sur nos photos d'identité.

Et, profitant du fait que j'étais bouche bée, elle a appelé une collègue pour lui dire:

- Tiens regarde Micheline! N'est-ce pas que c'est agréable de voir un grand sourire comme ça sur une carte d'identité?
- Ah ben ça c'est bien vrai!

Et là elles m'ont toutes les deux regardé avec un grand sourire et elles m'ont souhaité une bonne journée. 

C'était mon expérience la plus bizarre d'Angleterre. Les contrôleurs de train, l'alcool pas cher, les gens qui font la queue pour le bus, les salles de bains sans prises de courant, les robinets avec eau chaude et froide séparée, même les Weetabix : rien ne pouvait se comparer avec cette aberration : des gens de l'administration sympas.

(J'en ai encore froid dans le dos.)

Et si vous, vous n'en avez pas encore assez eu, alors écoutez ça :

Aujourd'hui, je suis allée sur le site de HMRC (les impôts britanniques, alias Her Majesty's Revenues and Customs, la classe) pour m'enquérir à propos du remboursement de mes impôts. Et en cherchant, je suis tombée sur un formulaire spécial qui s'intitulait : "Si vous pensez que vous payez trop d'impôts."

Je ne pense pas que je puisse trouver quelque chose qui résume mieux l'esprit anglais.


(Non mais sérieusement, vous imaginez ce genre de formulaire en France? Au bout de trois jours y'a pénurie de papier!)


PS : Lecteur, lectrice : tu es riche? Tu ne sais pas quoi faire de ton argent? Super, achète-moi ça. Tu seras un chou.

lundi 15 mars 2010

Time time for some action


Ce week-end ma copine Adèle est venue me voir.

Ma copine Adèle j'ai tellement baroudé avec elle qu'il faudrait inventer un nouveau terme pour notre relation. C'est presque du niveau "couple de lesbiennes", mais sans l'intimité physique (quand même).

- Oh regarde cette tasse à café, ça ferait un joli cadeau pour ton père!

Ce genre de relation. (J'ai même jamais rencontré son père. Mais Adèle et moi, on est deux grandes pipelettes devant l'Eternel, c'est pour ça.)

Du coup au lieu de rester se faire chier à Kettering, on a passé le week-end à Oxford et Cambridge (où l'expression "se faire chier" n'existe pas tellement c'est des endroits géniaux.)

On a aussi fait un détour par un marché français à Market Harborough, j'ai eu une bouffée de nostalgie en sentant des odeurs de vieux formage moisi, et voici le résultats : trois saucissons dans mon frigo. (Je suis même pas tellement une fan de saucisson, mais en Angleterre ils en ont pas, alors ça suffit pour titiller mes pulsions franchouillardes "ces gens sont des sauvages".) Heureusement qu'ils étaient à court de Reblochon, sinon je vous raconte pas l'orgie de tartiflette (En plein mois de mars, quelle horreur. C'est comme de faire une choucroute en juillet. Oui, les touristes de l'intérieur, c'est à vous que je parle. Bande de rustres.)

Bon alors Cambridge c'était super, on a fait du punting (oui oui la barque à touristes, on assume) avec un guide tout mignon qui poussait sa barque telle une gondole et qui nous racontait force anecdotes croustillantes. Bon, le coup du mec qui escalade la cathédrale pour y poser un cône de signalisation, pourquoi pas. Le coup du garde du corps du prince Charles qui a eu des meilleures notes que lui aux exams, ça m'étonne même pas tellement. Mais le coup du mec qui a ramené un ours comme animal de compagnie parce que c'était le seul non précisé sur la liste, j'y crois pas. (T'imagines l'ours à Cambridge, il aurait mangé tous les gens qui passaient en aviron. Quoique c'est peut-être pour ça qu'il y en a plus (des gens qui font de l'aviron, pas des ours).)

Et puis bon il y avait aussi des jolis bâtiments, un magasin de bonbons digne de Hansel et Gretel (du sol au plafond et jusque dans la cave!), un magasin de farces et attrapes (un coussin péteur! je savais même pas que ça existait encore!) des vélos tellement partout que ça me rappelait Strasbourg, et puis surtout des étudiants. Plein d'étudiants. Des jeunes intellos à lunettes avec des airs méga-snob et des fringues de bourges (Burberry, sors de ce corps, tu rends les gens moches). Imagine-toi, c'est comme une prépa géante qui s'étendrait sur une ville entière. Bon, moi j'aime pas trop l'ambiance des prépas, c'est pour ça que je suis allée à la fac (mon éducation hippie aura raison de moi) mais bon on s'en foutait un peu, parce que là c'était pas l'ambiance qui importait, mais les jolis yeux bleus de tous ces gosses de riches. (Et attention, des riches de chez riches, hein. Dans la rue j'ai croisé une Bentley.) Ça donne envie d'aller faire ses études à Cambridge et de mettre la main sur un héritier des Stuart. (Parce que bon, avec Professeur Flaxou, c'est moi la Sugar Mama. Quand je passe une nuit avec lui, je lui laisse de l'argent sur la commode.)

Donc ouais, Cambridge c'était magnifique, et tellement ensoleillé que nos pauvres yeux anglicisés criaient grâce de toute la force de leur cristallin. (HA! Je savais que j'arriverais à placer ce mot un jour!)

Mais c'était rien du tout comparé à Oxford.

Alors c'est sûr, je ne suis pas objective du tout. Les deux livres au monde qui ont le plus marqué ma vie ont été écrits par des hommes qui venaient d'Oxford. Depuis dix ans, ce nom résonne en moi comme une promesse. Oxford. Comme si, en visitant cette ville, je me rapprochais un peu des univers qui, pendant quelques années, ont été toute ma vie. Comme si, en touchant les pierres de l'université où avait vécu Tolkien, je pouvais me rapprocher de l'essence de son œuvre. Comme si, en marchant dans les mêmes rues que Lyra, je pouvais arracher aux vieux murs un morceau de son monde.

Alors oui, j'ai visité les colleges, j'ai contemplé la splendeur des vieux murs, j'ai vu la grande bibliothèque, j'ai humé son parfum de savoir, j'ai déambulé dans les ruelles tordues, j'ai marché dans un parc avec Adèle en essayant en vain de voir les cerfs qu'on nous avait promis dans la brochure (en fait ils étaient dans le parc juste à côté, on est vraiment des championnes) et on s'est fait suivre par un faisan (là tu rigoles, mais c'est flippant un faisan en gros plan, tu sais). J'ai pris des milliers de photos (mais c'était bien la peine vu que ma carte mémoire s'est mise en grève et refuse de se laisser lire, et que je sais même pas si mes photos sont encore dedans).

Et c'est vrai qu'on a eu toutes les poisses du monde : les trois quart des colleges étaient fermés pour cause de départ des étudiants, on était en dortoir mixte avec quatre mecs qui sont rentrés à trois heures, puis à six heures du matin, notre visite guidée était une perte de temps, j'ai failli mourir écrasée par un bus, le concierge m'a viré manu militari de l'université de Tolkien parce que j'avais passé outre le panneau "Closed" (du coup j'ai pu voir que la cour), l'Ashmolean Museum a fermé une heure plus tôt que prévu parce que des gens ont voulu se marier dedans (du coup on a eu seulement dix minutes pour visiter), la billetterie pour la grande bibliothèque était fermée trois quart d'heures à l'avance (du coup on avait seulement accès à une salle), Alice au Pays des Merveilles était complet (du coup on a regardé Shutter Island et j'ai rien compris), et j'avais oublié mon pyjama.

Mais c'est pas tellement grave, parce que pour moi, Oxford, c'était plus qu'une visite. C'était un pèlerinage.

Rien que de pouvoir marcher dans ces rues, entourée de ces murs, c'était déjà énorme. C'était mon rêve d'enfant réalisé.

Comme on était à Oxford qu'une journée, je n'ai pas eu le temps de voir les trois choses les plus importantes à mes yeux : Merton College, la tombe de Tolkien, et le jardin botanique.

Une bonne raison pour y retourner.


PS : Dites, mes lecteurs intelligents, y'en a pas un de vous qui serait informaticien ou photographicien par hasard? Si je vous envoie ma carte mémoire, vous pouvez me sortir mes photos de là avec des bidouillages électroniques ou des incantations chamaniques? (Ça me ferait super chier de devoir payer les gens de la Fnac pour qu'ils me disent la même chose que d'habitude : "On n'a rien pu faire ça sera trente euros".)

PPS : En fait j'ai essayé le coup des logiciels, mais ça me sert à rien, c'est carrément la carte qui n'est plus reconnue par personne (ni l'appareil photo, ni le PC, ni rien). Je sais plus quoi faire. Peut-être que je vais mourir de chagrin comme Monsieur de Clèves quand sa femme l'a mentalement trompé. (Au moins moi j'aurais une bonne raison. Y'a des photos de l'université de Tolkien sur cet appareil.) 

mercredi 10 mars 2010

Je sers l'enseignement secondaire et c'est ma joie


(on sent l'ambiance "ville de western")

Oh mes petits agneaux, c'est fou ce que je m'éclate en ce moment.

Mon boulot est coincé dans une boucle infinie : six mois que je fais exactement la même chose tous les jours, aux mêmes élèves, et six mois qu'ils ne retiennent pas une miette des informations que je force dans leurs cahiers au tracto-pelle. (Cinq ans de français et toujours pas capable de dire "aller". Pas "J'irai", pas "Je vais", rien que "aller". A ce niveau-là j'ai envie de dire qu'ils le font exprès, c'est pas possible autrement.)

L'inscription à l'ITIRI approche à grands pas, et j'ai eu le malheur de regarder certaines épreuves d'admission des années précédentes.

- Bonjour, traduisez "bouclier antimissiles" en russe.
- Euh, je sais dire "où est la pharmacie", ça marche aussi ?

Donc maintenant je sais que je ne serai sûrement pas admise parce que j'ai pas le niveau nécessaire en russe, et que donc cette année, que j'ai faite uniquement pour être sûre d'avoir les acquis suffisants pour entrer à l'ITIRI, ne va finalement pas servir à grand-chose.

A part que je vais pouvoir me la péter sur mon C.V. en faisant passer ça pour une mission caritative :

- Oui, j'ai enseigné le français à des jeunes défavorisés. C'était très satisfaisant de voir leurs petits visages réjouis alors qu'ils comprenaient enfin le sens du verbe "aller" au bout de cinq ans, une expérience humaine profondément enrichissante.
- Au bout de cinq ans ? Donc quand vous dites "des jeunes défavorisés" vous voulez dire "mentalement handicapés" ?
- Ha, si seulement.

Je crois que ça y est, mon enthousiasme a définitivement disparu. (Je suis même étonnée qu'il ait tenu aussi longtemps.) Je me lève tous les matins et j'ai l'impression que tout est gris. Le ciel dehors, la lumière du matin, mes céréales molles (bon en même temps, c'est le temps anglais et c'est des Weetabix, alors c'est peut-être pas seulement mon imagination qui les voit gris).

Même moi, je me sens grise. Comme si j'avais fumé cinq paquets de Gitanes juste avant d'aller au lit, ce genre de gris. Et à côté, je vois tous les autres assistants qui vont au boulot en sautillant, avec un moral qu'aucune insulte d'ado boutonneux ne peut entamer, et je me dis que c'est vraiment chouette qu'il y en ait qui soient bâtis pour être profs, mais que moi, on ne m'y reprendra plus.

Et puis bon, je suppose que ça n'arrange pas les choses d'être à Kettering, numéro un des villes anglaises où il se passe rien.

Vous voulez une preuve ? Je vais vous raconter tout ce qu'il y a à faire à Kettering. Exhaustivement.

Commençons par la culture.

Alors : il y a une bibliothèque avec 90% de westerns, de collection Harlequin et de polars suédois. (Les 10% restant c'est des livres sur la cuisine ou le bricolage pour les nuls : "Je monte une étagère Ikéa", "Je fais des oeufs sur le plat, tome 1 à 5", ce genre de trucs.) Sinon y'a aussi une librairie avec environ dix-huit bouquins :  Twilight, Harry Potter, et la collection complète des éditions "Sad true stories".

Je plaisante pas, c'est des best-sellers énormes : uniquement des histoires vraies à base d'enfants battus, de femmes qui épousent des psychopates, de prostituées accros à l'héroïne, enfin vous voyez le genre. Le tome qui s'est le mieux vendu pour l'instant, c'est une histoire de 200 pages d'une petite fille séquestrée et violée par son père pendant plus de dix ans. Ambiance. Et donc y'a des gens qui viennent dans la librairie en se disant "Qu'est-ce que je vais bien pouvoir prendre de chouette comme livre de chevet, didadidadoum, alors quelque chose de léger, pourquoi pas une histoire d'inceste et de séquestration dans une cave". Faut être un peu cinglé quand même.

Sinon y'a un cinéma qui n'a que deux séances par jour (faut pas les rater) et qui est à dix kilomètres du centre-ville. Et c'est tout pour la culture, pas de théâtre, pas de salle de concert. (Une fois y'a eu un concert, on pensait que c'était Kiss, en fait c'étaient juste des mecs qui jouaient du Kiss. Et puis de toute façon c'était même pas à Kettering.)

Après y'a le chapitre des sorties : donc il y a une demi-douzaine de pubs et trois boîtes de nuits. Les pubs, c'est sympa, mais faut éviter passé 23h sinon tu marches un peu dans le vomi.

Les boîtes, c'est généralement de la techno qui t'arrache les tympans, sauf au bar gay de la ville, où ils passent de la super musique, et où t'as pas encore les oreilles qui sifflent le lendemain, mais où personne ne danse. Jamais. Il y a un bon DJ, il y a une grande piste de danse, il y a plein de gens très contents d'être là, mais pas l'once d'une ambiance. Ça doit être un paradoxe spatio-temporel. (En plus j'ai toujours peur que les gens voient que je ne suis pas gay et me disent "bouh, fous le camp". Mais c'est pas de ma faute si vous êtes les seuls à passer du Janis Joplin!)

Sinon j'ai vu des centres de fitness, mais dieu sait que c'est pas moi qui vais y mettre les pieds.

Et j'ai aussi entendu dire qu'il y a un genre de mini-parc d'attractions. Comme une foire temporaire, mais permanente : un "grand huit", une coccinelle, des auto-stops (oui je suis alsacienne, je dis "auto-stop" et tant pis pour toi), et trois ou quatre de ces horribles machines à pinces où tu peux gagner des petits nounours roses si tu joues pendant huit heures d'affilée, mais t'as plus de chance de finir "Tintin au Tibet" sur Game Boy, si tu veux mon avis. Par contre, ce parc, j'ai essayé d'y aller deux fois, et je me suis toujours magiquement retrouvée devant ma maison. Et comme mon sens de l'orientation est absolument irréprochable ("Mais si, je l'avais garée juste là, la voiture, on a dû la voler c'est tout") alors je ne vois qu'une explication : ce parc est situé dans un univers parallèle où il est possible de s'amuser, et moi je suis coincée de l'autre côté.

Et voilà, je vous ai listé absolument tout ce qu'il y a à faire à Kettering.

J'ajouterai également, afin de vous peindre une image plus vivace de ce lieu enchanté, une conversation véridique qui a eu lieu il y a quelques jours, alors que je parlais à mes collègues :

- C'est marrant quand même, toutes ces mouettes. Je pensais pas qu'on en trouvait si loin à l'intérieur des terres.
- Oh, d'habitude elles ne viennent pas aussi loin. T'en trouveras pas ailleurs qu'à Kettering.
- Ah bon, comment ça se fait ?
- C'est les ordures qui les attirent.

Oui, je ne sais plus si j'ai déjà mentionné ce délicieux détail : à Kettering, j'ai vu des poubelles, mais elles sont toujours vides. Les gens, ils ne voient qu'une seule grande poubelle : la rue.

Dans la rue, il y a donc les choses habituelles : chewing-gums, papiers de bonbons, emballages de Mac Do, bouteilles en plastique, un peu comme chez nous mais faut les imaginer vraiment partout. Mais on trouve aussi des choses un peu plus étranges, comme des sacs poubelles pleins (les gens ont des grandes poubelles, mais faut croire qu'il y en a qui ont la flemme d'attendre les éboueurs, alors ils mettent leurs ordures comme ça, dans la rue, bien emballées.) ou encore des meubles en tout genre. Pourtant il y a une déchetterie, mais les gens mettent leurs choses cassées dans la rue : des vieux canapés, des chaises de bureau cassées en deux, toutes les vieilles merdes qui rentrent pas dans la poubelle.

(Le paradoxe, c'est quand même que j'ai pas vu une seule crotte de chien depuis que je suis arrivée ici. Peut-être que les gens ont aussi la flemme de ramasser les crottes et qu'ils ont cousu les trous de balle des chiens. Plus rien ne m'étonne.)

Donc voilà. Ça c'est l'endroit où je dois encore habiter pendant trois mois. (Et je pense que ça va être bien sympa quand il commencera à faire chaud, avec toutes ces ordures.)

Vivement la Russie, dis donc.

vendredi 5 mars 2010

C'est plus ce que c'était


Les gamins de mon école se divisent en trois catégories : les mignons, les rigolos, les têtes à claques.

Les mignons c'est ceux qui sont tout propres et bien coiffés, avec des petites voix et des grosses lunettes, et je suis sûre que s'ils avaient pas des uniformes ils porteraient des pantalons avec des bretelles.

Les rigolos c'est ceux qui m'inventent des trucs de ouf quand je leur pose des questions:

- Qu'est-ce que tu achètes quand tu fais du shopping?
- Des CD, des DVD, et des poireaux. Car de temps en temps je faim.

Les rigolos, ils me posent toujours des questions:

- Miss, vous avez déjà mangé des cuisses de grenouilles?
- Miss, c'est vrai qu'en France les gens jettent des briques sur les policiers?
- Miss, on m'a dit qu'en France il y avait pas de Burger King, c'est vrai?
- C'est vrai qu'il y a des communistes en France?
- C'est vrai que vous mangez du cheval?
- Vous êtes déjà allée à une manifestation?

(Le coup de la manif, ça c'est quand même vraiment trop mignon. Ils ont rien vu de la vie ces jeunes.)

Et les têtes à claques, ils me donnent au choix des envies de suicide ou de meurtre, selon comment se passe le cours, c'est un peu la roulette russe du malheur et de la violence. Y'en a certains, c'est chimique, je les vois et j'ai envie de leur mettre des baffes jusqu'à ce qu'ils saignent.

Les garçons ont des cheveux avec la mèche et il manque toujours un truc à leur uniforme (question d'honneur). Les filles voudraient bien s'habiller comme des putes (parce qu'elles sont comme ça au naturel) alors elles prennent des uniformes trois tailles en-dessous et ensuite elles s'étonnent qu'elles pètent les coutures. Mais ça reste quand même un uniforme scolaire. Du coup pour être bien sûres qu'on les prenne quand même pour des putes, elles se rattrapent avec le maquillage ("ah dis donc je suis bien contente que papy soit maçon, comme ça il me prête sa truelle"), les bijoux (big up pour les créoles qui se prennent dans les poignées de fenêtres!) et les cheveux (généralement effilés à morts et attachés en petits tas un peu partout sur la tête).

C'est des jeunes avec des noms populaires, genre Chelsea, Callum et Liam. Comme chez nous on a Léo, Théo, Matthéo, Enzo, Kenzo, Lorenzo, Lucas, Ethan. Ou bien Léa, Eva, Savannah (de Brossard), Shannel (oui, comme le parfum pour les vieilles dames, mais écrit en kikoolol), Lili, Lola, Lou, ou pire encore : Lilou. Non mais franchement. Lilou. Je suis désolée, mais moi quand on me dit "Lilou", j'entends ça :

- Lilou, au pied. Lilou, va chercher. Lilou, arrête de pisser dans les coins.

Cela dit les garçons, en terme d'image mentale, c'est pas mieux:

- Bonjour je m'appelle Enzo. T'as vu j'ai mis des tubes fluos sur ma voiture. 

Vous l'aurez compris, les noms populaires ça m'énerve. Et puis de toute façon ça sert à rien de se leurrer, avec mes gènes et ceux de Professeur Flaxou, nos enfants se feront taper de toute façon. (Les génies sont toujours incompris. Regardez Flaxou et moi. Quand on sort dans la rue les gens nous jettent des pierres. Incompris !) Donc autant aller au bout des choses, ou comme l'exprime poétiquement Professeur Flaxou: "foutu pour foutu" (Comment vous pouvez le préférer à moi, ça je ne comprendrai jamais) et appeler nos enfants avec des noms elfiques.

Donc les gamins têtes à claques ont déjà bâti un joli à-priori dans ma tête, avec leurs têtes boutonneuses et leurs prénoms de merde. Leur donner une chance, c'est un beau geste de ma part. Mais faut croire qu'ils s'en foutent.

- Adam, enlève tes pieds de la table. Chelsea, arrête de tirer les cheveux de Callum. Liam, pose cette agrafeuse et écris ta phrase. Andy, qu'est-ce que tu fais debout?
- Je m'casse c'est trop la zone ici.

(je traduis en langage de d'jeuns français)

- Non allez, tu restes en cours, on n'a pas fini.
- Ouais mais si moi j'ai fini, de toute façon le français ça sert à rien.

Le pire c'est qu'ils sont pas comme ça seulement avec moi. Moi je suis la petite jeune, la nouvelle, c'est normal qu'ils se comportent comme des sales cons. Mais avec les autres profs c'est la même chose. L'autre jour j'ai assisté à ça :

- Ellie, enlève ton bonnet.
- Nan.
- Allez, enlève ton bonnet.
- Nan j'vous ai dit !
- Pourquoi pas?
- J'aime pas mes cheveux aujourd'hui.

(La quatrième dimension.)

- Tu l'enlèves maintenant ou je mets ton nom au tableau.

(Ouuuh, trop fort le système de punitions en Angleterre)

- Nan mais vas-y c'est bon putain, pourquoi vous vous acharnez sur moi?
- Je m'acharne pas sur toi...
- Si vous vous acharnez ! Les autres vous leur dites rien !
- Oui ben les autres ils ont enlevé leurs bonnets.
- J'en ai marre !
- Tu te calmes.

(Ouh alors ça il fallait pas dire)

- ALLEZ VOUS FAIRE FOUTRE ! JE ME CASSE DE CET ENDROIT DE MERDE ! ALLEZ TOUS VOUS FAIRE ENCULER !

(Elle sort en claquant la porte et avec un mouvement de cheveux, pour montrer qu'elle est tourmentée, et donc là, tu peux commencer ton cours.)

J'adore ces gamins. Le mieux c'est les écouter parler entre eux.

- Ma vie elle est vraiment trop dark, tu vois.
- Grave.
- Pourquoi les gens ne sont pas prêts à comprendre que je suis une adulte ? J'veux dire j'ai quatorze ans quand même, quoi, merde ! On a plus besoin de l'école à cet âge-là ! Je veux fonder une famille avant d'être vieille !
- Clair.
- Du coup j'ai dit à Callum "je veux plus baiser avec les capotes parce que je suis prête à avoir un bébé avec toi" et du coup il m'a traité de sale pute et il m'a craché dessus.
- Tu devrais le larguer.
- Non parce que quand même, il s'est excusé ensuite. Regarde, il m'a envoyé un texto "Dsl bb lol".
- Trop romantique, t'as vraiment de la chance.
- Ouais mais quand même, je crois qu'il me trompe. C'est pour ça que j'espère tomber enceinte très vite, pour le forcer à rester avec moi toute la vie.

C'est une bonne idée, ça. J'aurais dû y penser aussi, merde alors. En plus j'ai déjà 21 ans et toujours pas de bébé, alors que je suis à deux doigts de la ménopause! Non là faut faire quelque chose, c'est plus possible.

(Mes gamines préférées, c'est quand même celles qui baisent sans protection puis qui disent "Oh non je suis tombée enceinte, relou, je comprends pas comment c'est possible." Dis donc, si seulement il existait une pilule magique qui t'empêchait de faire des bébés n'importe quand ! Ce serait rudement pratique ! Ah, si seulement on pouvait mettre un truc sur le zizi du garçon pour empêcher son sperme de faire des bébés dans ton ventre ! C'est vraiment trop dommage que ça existe pas !)

Je conclurai sur ce dialogue (véridique, comme tous ceux que vous avez vu dans cet article) :

- Miss, vous voulez devenir prof, plus tard?
- Avant de venir ici, j'hésitais....


maintenant, c'est NON.

mardi 2 mars 2010

L'Angleterre j'en tombe par terre



Ce week-end à Newcastle j'ai appris plein de choses.

J'ai appris qu'il y avait une autre ville en Angleterre qui s'appelait Newcastle et j'ai failli aller là-bas (ce qui aurait été moins cher parce que plus proche de chez moi, mais beaucoup plus chiant parce qu'il n'y aurait pas eu Adèle et Chloé dedans). Donc bravo l'originalité anglaise, Newcastle-upon-Tyne et Newcastle-under-Lyme. C'est comme si en Alsace il y avait un village qui s'appelait Kintzheim et un village qui s'appelait Kientzheim.... ah tiens.

J'ai appris que le plus vieux restau fish&chips de Newcastle datait de 1905 (Je le sais parce que j'ai mangé là-bas.) La plus vieille junk-food du monde, c'est leur idée de la classe en Britannie. Tellement classe que le restau ne désemplissait pas. (ces gens sont des sauvages, allez manger un canard à l'orange, pour l'amour du ciel !) Bon, j'avoue que c'était super bon. (Et puis attention, poisson équitable, patates bio, la totale.) Mais n'empêche que quand tu sors du restau, que tu montes un escalier, et que tu réalises qu'il y a une gangue de graisse qui fait pression sur ton coeur, c'est un peu flippant. Mon royaume pour une branchette de brocoli (avec de l'huile d'olive quand même).

J'ai appris que la plage en février, c'est tout plein d'ordures (mais du coup on s'est bien amusées à jouer avec, pire que des gosses dans une décharge). D'ailleurs la ville aussi est toute pleine d'ordures passé deux heures du matin, parce que les gens font la queue au MacDo et qu'ensuite ils jettent tout dehors. C'est le genre de choses qu'il faut voir pour croire : les nanas presque à poil qui sont assises par terre au milieu des emballages vides et des vieux bouts de cornichon, les mecs qui se roulent littéralement dans les feuilles de salade et la mayonnaise étalée sur les trottoirs...on se croirait dans un film post-apocalyptique, sauf que le fléau, au lieu des zombies, c'est la téquila.



J'ai surtout appris que :

1) Il y a un endroit en Angleterre où les filles ne s'habillent pas comme des poufiasses.
2) Il y a un endroit en Angleterre qui regroupe tous les garçons mignons (autrement je vois pas comment ce serait possible qu'il y ait une si grande concentration de moches ailleurs).
3) C'est le même endroit.
4) C'est très loin de chez moi. (J'ai envie de dire "évidemment")

Cet endroit, c'est l'université, où je serais restée toute ma vie si j'avais été intelligente. Nyah nyah nyah une expérience dans la vie active ce sera tellement profitable. Ce sera tellement cool de payer mon loyer et ma bouffe avec mes sous durement arrachés à la sueur de mon front en essayant d'enseigner des bribes de français à des gamins qui sont à un shoot d'héroïne de la délinquance juvénile complète. Des fois je me donnerais des baffes.

Et je ne peux même pas noyer mes soucis dans les salles obscures (le cinéma hein, pas les sex-shops) parce que le seul cinéma est à huit kilomètres du centre, que le billet coûte 10£, que le pop-corn est mou et insipide, en format "gros lard" uniquement, et qu'en plus il coûte la peau des yeux de la tête. Et invariablement, avec ça, ils me fourguent toujours un Pepsi sans bulles format "j'ai avalé un seau de sable juste avant de venir" et du coup je passe tout le film à penser "pas pisser, pas pisser, pas pisser". Donc maintenant je télécharge, et Hadopi sera bien malin s'il pense m'atteindre ici.


Non mais là on dirait pas, mais l'Angleterre c'est quand même génial hein. 

La bouffe bio coûte rien, l'entrée en boîte de nuit est pas cher, et en plus la musique est bonne, ce qui soit dit en passant est une première pour moi petite frenchie, habituée aux hits...frenchie. (Qui se souvient du monument de délicatesse "Laisse-moi deviner la couleur de ton string", chanson la plus populaire de 2004? ) Non attendez j'ai mieux, et ça tient en un seul mot: Tragédie. Pensez que l'Angleterre reste la patrie bénie où Tragérie n'est jamais arrivé. Tliky Boon, Silky Shaï, les pyjamas sur les jeans baggy, est-ce que tu m'entends eh oh, ça leur dit rien. Comme je les envie. (Bon ils ont quand même Christophe Maé et Fatal Bazooka. Mon coeur saigne.)

Les taxis sont pas cher, l'alcool est pratiquement gratuit, et les fringues OH MON DIEU. Ce lundi encore, à Newcastle (upon-Tyne, tu suis ?), j'ai fait une orgie de Primark : j'ai franchi le seuil et je suis entrée en mode berserker (quelqu'un savait que la mode de printemps c'était le rouge et le bleu rayé de blanc ? Les couleurs de ma patrie ? Je fonds !) J'ai acheté deux robes, cinq T-Shirts, un pantalon, et trois paires de collants. J'avais honte jusqu'à ce que je voie la facture: cinquante-cinq euros (je te fais la conversion parce que je suis gentille, mais t'y habitue pas). Ensuite je me suis barrée en courant des fois qu'ils remarquent l'erreur. Sauf qu'en fait c'était juste. 

Les gens sont sympa tout le temps, et même les caille-ra te tiennent les portes. Personne ne vient jamais se coller à toi en boîte avec l'excuse "oups pardon j'ai glissé et je me suis accroché à vos seins pour pas tomber". Les caissière tirent pas la gueule, même l'administration est sympa ("Écoutez si vous avez perdu ce formulaire c'est pas la mort hein", m'a-t-on dit un jour. J'ai cru que mes oreilles allaient fondre.)

Les DVD en promo coûtent 3£ et ce n'est pas "Kangourou Jack" ou "Boa VS Python", mais c'est "Les Affranchis" et "M.A.S.H". Y'a des livres en anglais partout (bon ça c'est un peu normal mais quand même) et des émissions de télé-réalité intéressantes (je ne pensais pas vivre pour voir ça un jour). On trouve du Caprice des Dieux au supermarché. Les églises sont magnifiques. Y'a des écureuils partout. Personne n'a jamais entendu parler de Johnny Halliday.

Et, quand il pleut, les gens sourient quand même.

lundi 22 février 2010

PIRATES !

(Une scène de crime ! Appelez Dexter !)

Comme si ça suffisait pas que j'aie stressé ma race à quatre heures du matin parce que j'avais oublié mon billet d'avion dans ma maison que j'avais fermée à clef et dans laquelle j'avais laissé les clefs. (Oui, je sais, je suis très forte.) Comme si ça suffisait pas que j'aie réveillé la voisine, son mari, et ses deux enfants en bas âge, pour lui demander la clef (qu'elle n'avait pas en fin de compte) parce que les seules autres personnes qui avaient la clef étaient ma mère (en vacances en Egypte) et ma soeur (qui éteint son portable quand elle dort)

Vous pouvez désormais m'appeler la suprême reine des quiches maxi best of. J'aurais pu oublier mon chargeur de portable, ma Game Boy, mon bouquin, ma brosse à dents, mais non ! Oublions les documents officiels et oublions dans la foulée d'embarquer les clefs de chez moi ! (J'espère que Professeur Flaxou ne me quittera jamais parce que sinon je pense que je vais finir par oublier où j'habite, puis par errer dans les rues jusqu'à oublier mon nom, puis par me faire renverser par un bus. Et ça m'emmerderait un peu quand même.)

Finalement il n'y a pas eu de problème, comme quoi ça paye de boycotter les charters :

- Bonjour, j'ai oublié mon billet.
- Pas de problème, on va tout de suite vous imprimer un... Vous faites quoi là ?
- Ben je vous tends mes fesses pour que vous puissiez m'enculer bien profond. C'est comme ça qu'ils font d'habitude chez Easyjet.

Faut me comprendre, ça fait un sacré changement de s'entendre dire "Oui pas de problème" là où on a l'habitude d'entendre "Va te faire foutre et mange ton billet électronique".

Donc j'étais contente, ma journée démarrait sur de bons auspices : j'avais un nouveau billet, on m'a offert la Business Class Lounge alors que j'étais pas du tout en Business, comme ça, par pure bonté d'âme (j'ai fait pipi dans des toilettes en marbre, je me sentais comme Al Pacino). 

Mais voilà, comme le destin ne m'avait pas abandonnée mais seulement oubliée quelques instants, il est revenu à la charge avec mon poids en karma. (J'ai tellement pas de bol avec les avions, dans une autre vie je devais être Oussama Ben Laden.)

Faut me comprendre, hein. Moi, je suis une pacifiste. J'aime la vie, j'aime les fleurs et les chansons. J'aime pas trop les oiseaux mais j'aime bien les chatons. Bref.

Je suis tout à fait pour la lutte contre le terrorisme, parce qu'il faut bien avouer que ça n'a pas l'air très fun toutes ces histoires de bombes et que dans la mesure du possible, ça me ferait plaisir de pas m'en ramasser une sur le coin de la gueule à chaque Paris-Londres. (Et je sais très bien qu'Oussama Ben Laden n'est pas mort, c'était de la licence poétique.)

Donc, les mesures de sécurité, je ne rechigne pas. Et c'est vrai que la plupart des choses qu'ils te demandent ne sont pas non plus trop handicapantes.

(Ah mais! On ne m'avait pas précisé qu'il fallait que je laisse mon lance-roquettes à la maison!)

Mais là, tout de même, je me dois de protester. Et je suis une fille raisonnable. J'ai emmené ni pic à glace, ni scie à rondins, ni club de golf, ni skateboard, ni revolver, et croyez-moi c'était pas l'envie qui manquait. (Y'a un terrain de golf à Kettering, j'aurais pu en profiter mais NON, je suis respectueuse des lois, c'est mon côté germanique.)


Mais faut croire qu'il fallait absolument trouver dans mon sac à dos une arme potentiellement dangereuse dans un futur putatif, et voilà à quoi on arrive.

Ils m'ont pris mes confitures.

Est-ce que ça pourrait s'apparenter à des bombes, je vous le demande et la réponse est NON ! C'est des confitures ! Des confitures de ma mamie ! Y'a rien dedans à part des fruits fraîchement cueillis de la forêt, beaucoup de sucre, et presque autant d'amour.

Et les contrôleurs m'ont confisqué mes confitures quand même. Sous prétexte que c'est des liquides. Ils doivent être bien malheureux pour être aussi méchants. (Ou alors ils ont jamais eu de mamie et ils savent pas que les confitures maison, c'est tout sauf liquide. Ce qui expliquerait pourquoi ils sont malheureux. Moi aussi je serais malheureuse à bouffer toute ma vie des confitures de supermarché, celles avec le pouce là.)

Je songe au complot. 

Peut-être que la personne mystérieuse qui m'a hacké deux fois quand j'étais célèbre me poursuit inlassablement et traque avec l'énergie de la haine toutes mes chances de bonheur terrestre. 

Peut-être qu'il y a déjà eu un cas de bombe-confiture et que depuis ils se méfient.

Peut-être surtout qu'une combinaison comme framboise-groseille, je suis pas la seule à en vouloir, et tout cela n'est qu'un prétexte pour que les gens de la sécurité puissent s'enfiler en douce les confitures de ma mamie.

Je penche pour la troisième option.





PS : Un bonus dans le lien du titre.

jeudi 28 janvier 2010

Foie de Volaille




EDIT : N'oubliez pas d'aller voter sur Oddly Specific pour ma super photo ! On peut voter toutes les 24 heures !


Ce week-end j'ai fait des trucs de ouf.

D'habitude le week-end je mets des chemises à carreaux, et c'est un peu le truc le plus ouf de ma semaine.

(Mon amour inconditionnel des chemises à carreaux et des jeans avec des taches de peinture faites exprès doit se faire en cachette. C'est un peu comme si j'étais mariée de force aux pantalons de tailleur.)

Mais ce week-end j'ai pris le train (c'est pas ça le truc ouf, hein. Ou alors ta vie elle est bien triste.) et puis je suis allée à Leeds.

(là tu peux dire wooouh, mais ce serait prématuré. Ou alors un petit wouh.)

A Leeds, j'ai retrouvé Adèle et Chloé, avec lesquelles j'ai partagé des années de galère universitaire, de stress des partiels et d'inside jokes :

- Eh ce matin je suis allée au bureau de Jacoberger, et elle m'a même pas envoyé bouler en disant "vous êtes pas grecque alors j'ai rien à foutre de votre gueule."
- Sérieux ?
- Nan j'déconne.

On a visité le centre ville, et par "visiter le centre ville" j'entends "marcher cinq minutes dans le hall du marché aux poissons et passer le reste de la journée au pub à boire des pintes de cidre en parlant des élèves qu'on trouve moches". (Ouais, mais elles sont vraiment pas chères ces pintes !)

On est restées dormir chez Chloé, et je me suis fait jeter sur le canapé parce que soi-disant je gigote en dormant. (Une rumeur totalement infondée par Professeur Flaxou qui m'a dit un jour "tu vois les chiens qui rêvent qu'ils pourchassent des lapins ? Ben pareil." Ensuite j'ai réfléchi et je me suis rappelée qu'effectivement, je passe les trois quarts de mes rêves à échapper aux zombies, et le dernier quart à chercher mes chaussures, alors forcément ça court dans tous les sens.)

Et puis on s'est levées très tôt le matin, direction la gare routière, un passage d'environ trois minutes à Manchester (et j'ai pas vu un seul footballeur) et puis : LIVERPOOL, BABY ! Eh ouais, deux jours dans la ville des Beatles et du Titanic ! (maintenant, tu peux faire un gros wooouuuuh !)

Ce week-end était placé sous le signe des pieds mouillés, ce qui était un peu une malédiction. Explication : vendredi matin, je me mets en route pour la gare de Kettering, et je mets mes seules chaussures imperméables (des baskets empruntées à ma maman.) Seulement il s'avère que la pluie anglaise doit être super perméable, parce que mes pied étaient trempés en cinq minutes. Du coup j'ai passé trois heures dans le train à me morfondre,et en arrivant à Leeds, je me suis dit "Parfait,  profitons d'être dans la grande ville où il y a plus d'un magasin, et allons acheter des chaussures imperméables". Donc j'ai acheté mes chaussures, et la vendeuse me dit :

- Vous voulez de l'imperméabilisant ? Sinon vos chaussures vont être mouillées s'il pleut beaucoup.
- Ouais ouais, écoute c'est super ma cocotte, mais j'ai une copine à passer prendre dans une minute quarante-cinq, alors épargne-moi tes tentatives de marketing fallacieux.

Et maintenant, tu rigoles parce que tu comprends ce qui s'est passé, mais je peux te dire que sur le moment c'était pas trop marrant.

Donc on a passé le week-end sous la pluie, à arpenter les rues piétonnes et à se faire presque tuer par des voitures aux vitres teintées.

On a visité la plus grande cathédrale anglicane du monde (c'est quand même un peu pour se la péter, parce qu'il y a pas beaucoup d'anglicans qui vivent ailleurs qu'en Angleterre.) mais c'est quand même la plus grande cathédrale que j'ai jamais vue de ma vie, et pourtant j'ai vu la cathédrale de Strasbourg !

On a visité le club où les Beatles ont fait leurs débuts, on est passées devant environ huit millions de musiciens de rue (et dans cette ville, ceux qui changent du Bob Marley, c'est les gens originaux.) On a aussi voulu sortir la nuit dans ce même quartier, mais c'était pris d'assaut par de la techno des années 90 et des filles à poil, alors on a dit non c'est bon un autre jour peut-être.

On a fait un tour en ferry, on s'est retrouvées paumées de l'autre côté du fleuve sur une place victorienne soi-disant "la plus jolie d'Angleterre", eh ben ça remonte pas mon opinion des places victoriennes. On est allées au musée voir des statues néo-grecques et des anciennes prisons. On a visité les pubs "juste pour se sécher un peu les pieds". On a trouvé des choses écrites partout sur les murs et c'était marrant (mais je me demande quand même d'où le mec tire ses statistiques.) On a pris des poses intelligentes dans le quartier culturel. On s'est promenées dans le parc le plus glauque d'Angleterre en parlant de fantômes et d'exorcismes.

On est allées à Chinatown manger chinois (en même temps tu vas pas à Chinatown pour manger grec) et le serveur était trop doué : d'abord il a confondu "porc" et "bœuf", et ensuite il a confondu "frit" et "bouilli", mais au bout de la deuxième fois j'avais faim quand même, alors j'ai juste pas laissé de pourboire.

On a dormi dans une auberge de jeunesse dont les appareils électroniques n'obéissaient qu'à moi (j'ai réussi à éteindre le chauffage et à allumer l'eau chaude par une simple imposition des mains, Jésus à côté de moi c'est une flipette), et on s'est faites griller en parlant français devant le gérant qui était français (et qui a dû bien rigoler).

On a parlé de nos mecs à l'humour très particulier : Fabien qui envoie un e-mail à Adèle en commençant par "J'espère que tu vas réussir à voir ce mail, des fois que Charlotte squatte l'accès à Internet" (ça fait plaisir de voir que ma réputation s'étend) et qui finit par "J'espère que tu t'amuses bien à la Piscine de l'Hiver". On a toutes bien rigolé, mais lundi soir, quand je me suis connectée sur Skype, les premiers mots de Professeur Flaxou furent "Alors, tu t'es bien amusées à Foie de Volaille ?" (C'est peut-être subjectif, mais mon copain c'est le plus drôle de tous les copains de la terre).

On a aussi parlé de ce qu'on voudrait comme super-pouvoir, de comment on va passer l'examen d'entrée de l'ITI-RI, et de pourquoi les enfants en Angleterre sont les rejetons du Malin.

C'était un super week-end.


Vous voulez voir des photos ? Des photos prises avec mon super Lumix que depuis que j'ai un Lumix grand angle et zoom optique je me la pète à mort alors que je sais même pas ce que "zoom optique" veut dire? Hein dites, vous voulez les voir ? Allez ouais.




(Ces gens sont des robots, c'est pas possible autrement. Descartes l'a dit et je le confirme. Il faisait mois huit degrés, pour l'amour du ciel ! )