mercredi 29 juin 2011


Samedi après-midi, ma copine Clémence et moi, on a décidé d'aller au Jardin des deux rives.

Pour les non-Strasbourgeois, le Jardin des deux rives est un grand parc qui s'étend des deux côtés du Rhin, et qui est relié par le "Pont de l'amitié" entre la partie allemande (Kehl) et la partie française (Strasbourg). C'est quand même la super classe.

(Aussi, la partie allemande est vachement plus propre que la partie française, on sait pas si c'est fait exprès.)

Du coup, j'ai traîné Professeur Flaxou dehors pour son bol d'air frais hebdomadaire, et j'ai dit à Clémence qu'on se retrouverait devant l'entrée du jardin.

Ce qu'on avait pas prévu avec Flaxou, c'est que c'était le premier samedi des soldes, et que bien sûr, tout Strasbourg allait en Allemagne pour acheter des trucs encore moins chers. (Note aux non-frontaliers : en Allemagne, tout est moins cher. Sauf les amendes pour dégradation de l'espace public.) Du coup on s'est retrouvés dans un bus absolument blindé. Et blindé des gens les plus chelous de l'espace.

D'abord, y'avait une meuf qui se baladait dans un bus bondé, à trois heures de l'après-midi, avec une canette de 8,6 en main.
(La bière avec le meilleur rapport qualité-cuite.)

En fait je l'ai reconnue que quand elle s'est mise à gueuler sur des ados qui lui avaient rien fait. Là je me suis souvenue qu'elle faisait partie de la bande de poivrots du Faubourg National (l'arrêt de tram par lequel je passais tous les jours pour aller à la gare), qui allaient au PMU en face de l'arrêt de tram quand il faisait très froid, et le reste du temps, ils achetaient leurs bières la supérette et ils passaient leur journée à picoler sous les abribus. Je me suis souvenu d'elle, parce que c'était celle qui se prenait toujours la tête avec la meuf sans dents. Là, la meuf sans dents était pas là, alors elle s'est mise à chercher la bagarre avec le bus entier.

- Non mais tu me manques pas de respect! C'est pas parce que j'ai une bière en main que tu peux me manquer de respect! P'tit con de merde! Si t'étais mon fils j'peux te dire que je t'aurais mis une tarte entre les deux yeux, ça t'aurait pas fait de mal.
- Mais j'ai rien dit!
- On s'en fout! Tu m'as regardé! Tu m'as regardé en souriant! Putain j'vais te casser la gueule!

Ensuite il y avait le vieux derrière moi, qui avait sa tête juste devant la barre à laquelle je m'accrochais, et qui s'est mis à tousser comme un tuberculeux la bouche grande ouverte, en projetant bien de la salive PARTOUT sur ma main. (J'ai cru que j'allais gerber.)

Et en plus, on a loupé notre arrêt, et on a dû faire 500 mètres de plus avec la tribu des cassos', pour tout se retaper ensuite en sens inverse, parce qu'on était arrivés au terminus. En plus, quand les portes se sont ouvertes, le tuberculeux crado s'est mis à hurler comme un goret :

- Laissez-moi passer! Poussez-vous, rhâ mais poussez-vous! Je dois descendre!

(Ben ouais connard, tout le monde doit descendre, c'est le terminus.)

Apparemment il avait pas compris, parce qu'il est passé devant tout le monde, et il a même bousculé une poussette au passage. (D'ailleurs, j'ai passé tout le trajet à me faire toucher les fesses par le bébé de ladite poussette. Heureusement qu'il était mignon, parce que oh, je suis pas une fille facile.)

Encore secoués par ce périple, on s'est donc mis en marche, sauf qu'avec tout ça, on était en Allemagne, du coup au lieu de rejoindre Clémence à l'entrée du côté français, on l'a rejointe au milieu du pont des deux rives. Elle était contente de nous voir.

- Je suis trop flippée, y'a un mec chelou qui m'a collée dans le tram et qui m'a dit qu'il voulait aller à Kehl avec moi. Ensuite il a pris le même bus que moi, mais je suis allée tout au fond, et il a passé tout le trajet à me faire des coucous.

(C'était la journée des cassos' pour tout le monde, apparemment.)

Pour se remettre de nos émotions, on est allés jouer avec les jeux d'eau et pêcher des cailloux pour ma collection.
 (Là je venais de trouver un caillou.)

Ensuite on est montés en haut d'une sorte de grand plongeoir, mais en fait c'était pas fait pour plonger je crois. (Sauf si on veut mourir d'une mort atroce, peut-être.) Parce qu'on montait haut, haut, haut! Une fois en haut, Professeur Flaxou faisait une tête genre on sait pas s'il va vomir ou pas (parce qu'il a le vertige), alors pour le distraire, on a fait un avion en papier et on l'a lancé, mais il a volé un peu comme un caillou. (A la différence de ceux des petits Allemands qui avaient eu l'idée avant nous, ils faisaient des jets supersoniques, c'étaient des fils d'ingénieurs en aérospatiale ou je sais pas quoi.)

(Et y'avait un vent de ouf, c.f. mes cheveux qui font, mais alors, n'importe quoi. Notez également Professeur Flaxou, qui se tâtait pour savoir s'il allait vomir ou bien juste tomber dans les pommes.)

Du haut du plongeoir, on voyait tout : le Rhin, Strasbourg, Kehl, la piscine, des courts de tennis, un stade de foot, les Vosges, la Forêt Noire, même un vieux qui se baignait en slip dans une mare.
(Ces gens sont fous!)

Ensuite on est allés crapahuter sur des jeux conçus à la base pour les enfants, mais bon, même nous on a eu du mal à monter, alors hein. C'était des jeux super sophistiqués, il fallait atteindre un mur en montant sur des cordes, ou alors tu pouvais t'éclater à faire semblant d'être un Schtroumpf sur le mobilier géant.

(Non, en fait c'est notre taille réelle.)

Ensuite on voulait aller au centre-ville de Kehl pour boire un coup, sauf qu'aucun d'entre nous n'était jamais allé au centre-ville de Kehl. (La plupart du temps, les Strasbourgeois se limitent au Mac Do qui est à la frontière.) Du coup on y est allés un peu au pif.

- T'es sûre que c'est par là, Charlotte?
- Mais oui!
- Comment tu sais? Je croyais que t'étais jamais venue ici.
- Ben non, mais c'est logique.
- Tu connais la disposition de la ville?
- Ben non, mais y'a une église par ici. L'église est toujours au centre du village, la ville est toujorus bâtie autour du village, donc la vieille ville est autour de l'église.

Et puis ensuite on est arrivés à l'église, et y'avait pas de vieille ville autour. Professeur Flaxou s'est énervé parce qu'il déteste marcher (c'est vrai, pourquoi marcher quand c'est pas pour une nécessité première? genre faire les courses, ou aller acheter un PC) alors il a ronchonné en me lançant des brindilles :

- On est perdus à cause de toi! Espèce de trouduc' ! J'te déteste! Sans toi je serais encore en train de jouer à Starcraft et peut-être que je serais passé en Diamant! Maintenant on est perdus et je pourrai pas jouer avant au moins ce soir! Ma vie est fichue!

Mais en fait, on était juste à côté d'une autre église, qui elle était vraiment dans le centre-ville. (Et toc.) Donc on s'est assis sur une terrasse et on a mangé une glace noisette-yaourt recouverte de noisettes, de sauce chocolat, de croquant, et de Ferrero Rocher. (C'était comme d'être mort et d'arriver au paradis.) Ensuite on a voulu arpenter les rues, mais mine de rien, on avait déjà pas mal arpenté des trucs dans la journée, alors à la place, on a voulu faire du tourniquet.

- Putain y'a le père qui fait tourner le tourniquet, si on y va, il va nous engueuler.
- Regarde! Y'en a un autre là-bas!
- Il est déjà pris.
- On a qu'à y aller avec le gamin.
- Ouais c'est ça, pour qu'on nous prenne pour des pédophiles, bonne idée.
- Mais c'est le seul moyen! Regarde comme il a l'air heureux, avec son air à la con! Il va jamais partir!

Ensuite, on a repris le bus vers la France, puis le tram, et on a rencontré le quatrième gars chelou de la journée : un mec qui avait une canette de Coca vide, il l'a écrasé dans sa main, et il a shooté dedans de l'arrêt de bus jusqu'à l'arrêt de tram, avant de la mettre à la poubelle (ça c'est bien). Et puis ensuite, dans le tram, il a sorti une bouteille de rouge et il en a proposé à tout le wagon (ça, c'est moins bien).

On a parcouru la moitié de Strasbourg, pour finalement aller au Wacken parce que c'était la foire et qu'on voulait perdre tout notre argent en barbe à papa et machines à pinces.

Non, mais en vrai on n'est pas des tocards, on a juste fait un labyrinthe de miroirs et un manège où j'ai cru que j'allais mourir. (Quoique j'avais bien envie d'essayer les grosses bulles en plastique où tu flottes sur la surface de l'eau.)

Le manège où j'ai cru que j'allais mourir, c'était en fait le bateau-pirate d'Europa-park, en amélioré.

Encore une fois, pour les non-frontaliers qui n'ont que des parcs d'attraction pourris à proximité (Genre Eurodisney, Walibi Schtroumpf, ou pire : le Futuroscope), Europa-park c'est tout simplement le parc d'attraction le plus cool du monde, mais, pas de bol pour vous, il est en Allemagne. Et le bateau-pirate, c'est ça :

Hein, ça a l'air sympathique et bon enfant, vu d'ici? Eh ben non. 

En fait ça se balance d'avant en arrière jusqu'à ce que tu penses que tu vas mourir écrasée sur le sol, et tu t'attends à chaque instant à ce que le bateau soit emporté par son élan et fasse un tour complet sur lui-même.

Le manège de la foire, il était pareil dans le principe, sauf qu'on était accrochés à des nacelles, qui, en plus de se balancer d'avant en arrière, tournaient aussi sur elles-mêmes. (Des fois que t'aies pas encore trop envie de vomir.) Et donc c'était écrit sur le manège "impression de saut dans le vide", sauf que je pense que ça aurait été plus réaliste de dire "impression de mort imminente". Parce que la nacelle montait, montait, montait, tu voyais tout le parc en-dessous de toi, puis elle se laissait tomber, et avec le mouvement de rotation, tu voyais juste le sol sous tes pieds. Environ 3OO mètres sous tes pieds. (Ajoutez à ça que, pendant toute la durée du manège, mon cerveau répétait en boucle "Destination finale 3".)

Finalement, on est sorti indemnes, mais on avait un peu le cœur dans les chaussettes, alors on a acheté des bonbons et on est rentré chez nous. (Et on a pas vu un seul contrôleur! Trois billets de tram achetés pour que dalle!)

La prochaine fois, on fera le côté français du Jardin des deux rives. Je me demande quel genre de gens chelou on va trouver de ce côté. Peut-être que je devrais commencer une nouvelle collection, au lieu des cailloux : une collection de gens chelou. 

En tout cas, elle est bien partie.

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