samedi 20 décembre 2014

Brève ordurière


Le problème quand on habite dans un pays où (presque) personne ne parle français, c’est que personne ne comprend le français.

(Redondance du jour, bonjour.)

Du coup, Professeur Flaxou et moi, à force de parler ensemble en sachant que personne ne peut nous comprendre, on s’est un peu mis à partir en couille.

Ça a commencé doucement, avec les petits mots doux habituels qu’on se réserve en privé, comme « face de pet » ou « rectum de poulpe » (nous sommes un couple très uni). Exemple :

- Dis voir rectum de poulpe, tu veux squatter encore plus de couverture, ou tu veux que j’t’aide ?

(Oui car, quand je m’endors, j’adopte la technique dite du hamster : je me fais un p’tit nid.)

Mais ça a vite dégénéré à des « ta mère » qui sortaient de nos bouches sans même un instant de réflexion :

- Ils ont renversé le ketchup partout dans la salle de pause, c’était la grosse saloperie !
- C’est ta mère la grosse saloperie.



Et puis avant d’avoir eu le temps de dire ouf, on était comme deux charretiers à balancer du langage ordurier à la volée dans toute la maison. Chose qu’on faisait l’esprit tranquille et sans trop le réaliser, jusqu’à ce qu’un beau jour, Maria nous demande :

- Comment on dit « Dear » en français ?
- On dit « Chéri ».
- Ah bon, c’est pas « Trouduc » ?

(Là, faut s’imaginer moi morte de honte et Flaxou tordu de rire, le tout devant la tête interloquée de Maria.)

On pourrait penser que ça nous aurait servi de leçon de se faire prendre en flagrant délit de gros mots par une coloc qui comprend même pas la langue, mais ça ne nous a pas arrêtés.

(J’ai d’ailleurs dû sortir la menace ultime (le spoil de Game of Thrones) auprès de Flaxou, qui, après l’incident du Trouduc, avait décidé que ce serait la chose la plus hilarante du monde d’apprendre des gros mots à Maria à son insu.)

(Bonjour, cet homme a 29 ans.)

Bref, deux ans qu’on vit coupés des francophones et on parle comme des marchands de poisson.

C’est déjà pas bien reluisant en soi, mais en somme, ce n’était pas trop un souci jusqu’à hier soir.

Hier soir où, en rentrant du boulot, je suis arrivée dans la chambre et Flaxou était sur le PC, et j’ai dit :

- Fla, t’as pensé à faire la vaisselle ?
- J’ai pas eu le temps….
- Ho tu fais chier, fils de pute!
- …. Parce que je suis sur Skype avec ma mère.

Mère qui avait donc parfaitement entendu (courtoisie du casque de gamer à 200 boules) que je venais de la traiter indirectement de pute.



Voilà voilà.


C’est magnifique.



Épilogue :

- Bon Fla je suis avec ma mère sur Skype alors pas de grossièretés, hein !
- Non non.

*cinq minutes plus tard*

- …Et puis dimanche on va sûrement faire une balade, faut juste espérer qu’il fasse pas moche.
- C’est ta mère qui est moche.

(Eh ben les enfants, on n’est pas sortis de l’auberge.)

1 commentaire:

  1. Une pensée émue pour mon charmant "ça fait du bien de chier" en sortant des toilettes bondées à l'aéroport de Genève. Ah, on n'est plus aux USA, les gens parlent français ici...
    Je compatis et j'ai beaucoup ri!

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